Aujourd’hui, la moitié de la population mondiale a moins de 25 ans. En Afrique subsaharienne, tout particulièrement, mais aussi dans une grande partie du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord ainsi que dans de nombreux pays d’Asie, la proportion de jeunes hommes et femmes n’a pas encore atteint son point culminant, et elle continuera d’augmenter sur les deux prochaines décennies. Pour pouvoir vaincre la pauvreté, il est donc indispensable de porter la plus grande attention aux besoins de cette jeune génération. Selon de récentes estimations, près d’un quart de la jeunesse, c’est-dire les 15-29 ans, est inactive, et près de la moitié est soit exclue de l’économie formelle soit empêchée de développer pleinement son potentiel. Dans les dix années à venir, il va falloir créer 47 millions d'emplois, c’est-à-dire quasiment 400 000 par mois, pour intégrer ces jeunes sur le marché du travail. Tout aussi important est le mécontentement grandissant que ceux-ci expriment vis-à-vis du manque d’opportunités et de participation, non seulement dans la sphère économique, mais également dans les sphères politique et sociale. Le problème est d’une ampleur telle qu’il impose de changer complètement la donne, et aucun acteur n’est à lui seul en mesure de proposer une solution globale.
Dans le cadre des efforts qu’elle déploie en faveur des jeunes, la Banque mondiale a récemment accueilli un Sommet mondial de la jeunesse, qui a rassemblé plus de 500 participants venant de plus de vingt-cinq pays. Au nombre des orateurs invités figuraient Ahmad Alhendawi, envoyé spécial des Nations Unies pour la jeunesse, et des représentants d’organisations de la société civile, d’organisations non gouvernementales (ONG) internationales, du secteur privé et d’associations pour les jeunes. Cet événement a été un grand succès, car il a réuni les différentes parties prenantes au plan d’action à mener pour la jeunesse dans le monde.
Qu’a-t-il apporté ? En quoi peut-il faire avancer « l’agenda » ? Comment la Banque mondiale peut-elle contribuer utilement à ce plan d’action ? Lors du sommet, la table ronde d’experts sur l’Agenda post-2015 : remédier à l’exclusion des jeunes a suscité une discussion passionnée. Trois propositions fondamentales sur la suite de l’action à engager se sont dégagées de ce sommet :
Une solution transversale pour les jeunes dans le programme de développement pour l’après-2015.La récente Assemblée générale des Nations Unies a examiné un premier projet d’agenda pour l’après-2015, c’est-à-dire au-delà des objectifs du Millénaire pour le développement. À la lecture du rapport du Groupe de personnalités de haut niveaudes Nations Unies, les délégués de 185 pays ont vu, pour la première fois, la priorité que constitue la jeunesse pour la communauté internationale énoncée sous la forme d’une cible de développement claire et quantifiable : « réduire de x % le nombre de jeunes non scolarisés, au chômage ou n’étant pas en formation ». Prôné par plusieurs organisations des Nations Unies et déjà utilisé dans plusieurs pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), dont le Royaume-Uni, cet indicateur spécifique considère la situation des 15-29 ans au-delà du prisme étroit du chômage. Il rend compte de l’inactivité et de l’exclusion des jeunes avec pertinence, et peut être facilement calculé sur la base d’enquêtes standards comportant des questions sur l’emploi, les études et la formation. La Banque mondiale peut jouer un rôle crucial dans la progression de cet agenda mondial pour la jeunesse en veillant à ce que les solutions offertes aux jeunes soient de nature transversale, conformément aux recommandations du rapport du Groupe de personnalités de haut niveau, mais aussi à ce que l’indicateur "NEET"**soit calculé de façon cohérente, via toutes ses enquêtes, et suivi dans le cadre de ses évaluations de la pauvreté, rapports de référence et stratégies-pays.
Un objectif pour le développement ciblant les jeunes.Les acteurs du développement ont besoin de toute urgence d’une approche commune pour le développement des jeunes. Il faut notamment s’attacher à rationaliser et à accroître les investissements dans la jeunesse, sur la base de données probantes, à mobiliser des ressources, à suivre les avancées et, pour la communauté internationale, à rendre compte des progrès accomplis par les jeunes. C’est la vie de la moitié de la population mondiale qui est en jeu et il est impératif que les acteurs du développement visent un objectif très ambitieux en la matière. Aussi, pour parvenir à réduire le nombre de jeunes qui ne sont ni scolarisés, ni en emploi ni en formation professionnelle, conformément à l’indicateur NEET, il faudrait aider un milliard de jeunes à trouver un travail, à se lancer dans l’entrepreneuriat, à poursuivre une formation qualifiante et à s’engager comme citoyens. Il s’agit de toucher et soutenir un milliard de jeunes sur 15 ans, entre 2015 et 2030, à savoir un peu moins de 70 millions de jeunes par an. Cela suffira-t-il pour mettre fin à la pauvreté ? Cela suffira-t-il pour favoriser une prospérité partagée ? L’objectif fixé pour l’indicateur NEET devrait probablement être encore plus élevé, mais ces chiffres donnent une idée de l’ordre de grandeur des efforts nécessaires.
Groupes consultatifs et plateformes de la jeunesse. Il y a peu de temps, l’envoyé spécial des Nations Unies pour la jeunesse a lancé un programme encourageant les pays à créer des groupes consultatifs ou des plateformes de la jeunesse aptes à conseiller les ministères nationaux et les délégations nationales, ainsi qu’à contribuer au suivi de l’application des politiques publiques. L’appui à cette forme de participation citoyenne constitue aussi l’une des priorités de la Banque mondiale. Nous avons ainsi aidé à la mise en place de groupes consultatifs de la jeunesse dans le cadre de nos programmes-pays, du Pérou à la Macédoine, en passant par le Brésil, et, plus récemment, au sein de la Ligue arabe. Les Nations Unies ont franchi une étape supplémentaire en décidant d’instaurer des Conseils de la Jeunesse pour tous leurs bureaux-pays, afin de veiller à ce que leurs programmes répondent parfaitement aux besoins et aux aspirations de la génération qui changera le monde. Le moment est crucial pour les gouvernements et tous les partenaires au développement : il s’agit de joindre la parole aux actes. L’établissement de partenariats avec les associations de jeunes sera également essentiel, car il permettra de se concentrer sur les problèmes qui importent réellement, et à la Banque de se montrer à l’écoute et d’apporter de meilleures solutions.
Ce sont donc là trois propositions très concrètes pour soutenir le plan d’action mondial pour la jeunesse. Donner aux jeunes hommes et femmes l’opportunité de façonner leur propre avenir sera fondamental, et nous n’y parviendrons que si nous agissons ensemble, avec des partenariats solides.
Alors, si vous avez d’autres idées ou suggestions pour accroître la participation des jeunes et réduire leur inactivité, partagez-les et discutons-en !
** Note du traducteur : « NETT » est l’acronyme en anglais de l’expression Not in Employment, Education and Training (« ni scolarisés, ni en emploi ni en formation professionnelle »).
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