Maroc : une approche innovante pour améliorer les résultats de la petite enfance

Ce billet est le premier d'une série consacrée aux efforts déployés pour améliorer le développement de la petite enfance au Maroc. Dans cette première édition, nous présentons le programme phare du gouvernement en la matière.

Le Maroc amorce un virage historique. En 2018, le Royaume a pris un engagement audacieux : renforcer ses investissements dans le développement de la petite enfance, en accordant une attention particulière aux zones rurales. En à peine cinq ans, le taux de préscolarisation est passé de 45 % à 76 %. Parallèlement, un nouveau modèle de santé communautaire améliore l’accès aux services de santé et de nutrition maternelle et infantile en milieu rural, tandis qu’une stratégie innovante de communication pour le changement social et comportemental a été lancée pour améliorer la nutrition durant les 1 000 premiers jours de vie d’un enfant, les deux premières campagnes ayant chacune touché plus de 13 millions de personnes.

Les preuves de l’importance des investissements dans la petite enfance (a) sont indéniables. La recherche sur le cerveau et les études économiques montrent que ces investissements ont des effets durables tout au long de la vie (a) et des impacts transformateurs (a) sur les sociétés et les économies. Mais savoir ne suffit pas : il faut agir. Que pouvons-nous retenir du succès du Maroc ?

L'Initiative nationale pour le développement humain (INDH) au Maroc

En 2005, le Roi du Maroc a lancé l’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) afin d'améliorer les conditions de vie des groupes pauvres et vulnérables. Dotée d’un mandat d’innovation, l’INDH est rattachée au ministère de l’Intérieur et agit comme incubateur et moteur de changement : une fois les approches testées et validées, les ministères sectoriels et les collectivités locales en assurent la mise en œuvre.

L’INDH collabore avec les autorités et les communautés locales pour soutenir les familles en leur offrant des services complets. Le Maroc a fixé des objectifs ambitieux, notamment la réduction de la mortalité et de la morbidité maternelles et infantiles en zones rurales, ainsi que l’atteinte d’un taux de préscolarisation de 100 % pour tous les enfants de 4 à 5 ans d’ici 2027.

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, l’INDH a travaillé en partenariat avec le ministère de la Santé et de la Protection sociale, le ministère de l’Éducation nationale, de l’Éducation préscolaire et des Sports, ainsi qu’avec les autorités locales, afin de mettre en œuvre des programmes innovants.

Développer l'enseignement préscolaire dans les zones rurales

L’INDH a incubé un partenariat public-privé pour développer l’enseignement préscolaire dans les zones rurales. Le ministère de l’Éducation nationale, de l’Éducation préscolaire et des Sports établit les normes et veille à la qualité des établissements préscolaires, tandis que des associations à but non lucratif, telles que la Fondation Marocaine du Préscolaire (FMPS) et la Fondation Zakoura, interviennent comme prestataires faîtiers, collaborant avec des ONG locales pour former des éducateurs préscolaires et gérer des écoles préscolaires de qualité. Cette approche a produit des résultats remarquables : le taux de préscolarisation en zones rurales est passé de 33 % en 2017 à 91 % en 2024, et les disparités entre les sexes en matière d’accès ont été éliminées. Plus de 9 000 nouveaux éducateurs préscolaires ont été recrutés et formés, et les résultats de l’apprentissage des jeunes enfants font l’objet d’un suivi régulier. Il s’agit d’une montée en puissance remarquable à grande échelle, démontrant un engagement fort envers la qualité.

Promouvoir de nouveaux comportements en matière de santé et de nutrition

Pour combler les lacunes en matière d’accès aux services de santé et de nutrition maternelles et infantiles, un modèle communautaire novateur a été mis en place. Il repose sur la coordination de trois acteurs : les centres de santé ruraux, les maternités communautaires appelées « Dar Al Oumouma » et les agents de santé communautaires. Plus de 500 000 femmes et enfants ont été orientés vers des soins, et une stratégie de généralisation à grande échelle a été définie à la suite d’une évaluation approfondie de la phase pilote.

Une stratégie de communication pour le changement social et comportemental (CCSC), fondée sur des données probantes, a également été développée pour promouvoir l’importance d’une nutrition optimale durant les 1 000 premiers jours de vie d’un enfant. Les deux premières campagnes ont touché plus de 13 millions de personnes via la télévision, la radio, les médias sociaux et la presse locale, tandis que plus d’un million de bénéficiaires ont participé à des séances de conseil en groupe. Les enquêtes post-campagne ont révélé une forte mémorisation des messages et une amélioration des intentions parmi le public cible.

Optimiser le suivi et l’évaluation par la mise en place de mécanismes adaptés

L’INDH a également mis en place une plateforme visant à renforcer la planification, le suivi et la prise de décision au niveau local pour les services de développement de la petite enfance. Cette plateforme permet aux décideurs de collecter des données afin d’identifier les besoins prioritaires en matière de développement humain, d’élaborer des plans provinciaux fondés sur des preuves et d’allouer les financements pour répondre aux priorités identifiées.

Quels ont été les facteurs clés de ces succès ? Trois éléments majeurs :

1. Innovation et incubation pour la durabilité. Avec le lancement de sa troisième phase, l’INDH a réorienté son approche pour se positionner comme un centre d’innovation en politiques publiques dédiées au développement humain. Elle a gagné en agilité, pris des risques calculés, expérimenté des innovations, évalué leur impact avec rigueur et ajusté les approches si nécessaire, en visant le transfert de la propriété à d’autres organismes publics à long terme.
2. Visibilité et pouvoir de mobilisation. L’INDH dispose d’une forte capacité à rassembler, influencer et agir. Elle favorise la coordination, la cohérence et les synergies, et adopte une approche pangouvernementale aux niveaux national, régional et local.
3. Accent sur la qualité, la mesure et l’évaluation. L’INDH a investi d’importantes ressources pour évaluer la qualité des classes préscolaires et mesurer les acquis des jeunes enfants. Les données quantitatives et qualitatives ont également alimenté la stratégie de communication pour le changement social et comportemental (CCSC), et l’évaluation de la phase pilote a conduit à des améliorations dans la stratégie d’intensification de la santé et de la nutrition communautaires.

Pour soutenir le Maroc dans la concrétisation de ces succès, la Banque mondiale a accordé un prêt de 450 millions de dollars dans le cadre du Programme d’amélioration des résultats en matière de développement de la petite enfance dans les zones rurales, ainsi qu’un appui technique via le Programme d’appui au développement du capital humain, en collaboration avec le gouvernement, pour concevoir et tester des approches et développer des outils et systèmes de contrôle de la qualité. La Banque mondiale reste pleinement engagée à soutenir ce travail remarquable, qui contribuera à mieux préparer la prochaine génération.

LIENS UTILES :

La Banque mondiale au Maroc

La Banque mondiale au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, Afghanistan et Pakistan (MENAAP)