Il y a du changement dans l’air au Maroc.
Une transition démocratique et sociale est à l’œuvre depuis les manifestations populaires inspirées par le Printemps arabe, pour appeler à plus de démocratie, moins d’exclusion et un partage des fruits de la croissance. La consolidation du cadre de gouvernance du Maroc sera la pièce maîtresse de la transition. Pour l’instant, elle a débouché sur la révision de la Constitution et l’organisation de nouvelles élections. Le nouveau texte consacre les principes de transparence, de responsabilité et de participation, réclamés par la population, et introduit de nouveaux droits (comme le droit à l’information et les consultations publiques) pour favoriser un mode de gouvernance plus ouvert.
Le nouveau Projet d’appui à la mise en œuvre du cadre de gouvernance au Maroc, conçu avec la Banque mondiale, entend faire de ces nouveaux droits constitutionnels une réalité. Il appuiera l’adoption et l’exécution de politiques et de lois selon trois grands axes : la participation plus large de la population dans les affaires publiques ; une utilisation des deniers publics plus efficace et plus responsable ; et l’amélioration de la décentralisation budgétaire pour donner aux collectivités locales davantage de moyens d’autogestion.
Ce projet bénéficie d’un financement de 4,5 millions de dollars du Fonds pour la transition dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), approuvé le 20 février 2013. Ce fonds a été institué par le Partenariat de Deauville et lancé lors des Assemblées annuelles de la Banque mondiale et du FMI, à Tokyo, dans l’objectif de soutenir le processus à l’œuvre dans la région. Il soutiendra les réformes en allouant, via les institutions financières internationales, des fonds aux projets ayant vocation à transformer le quotidien des habitants. Lors de la deuxième réunion de son comité de pilotage, organisée fin février à Rabat, le Fonds pour la transition s’est engagé à appuyer les réformes de la gouvernance au Maroc.
Le projet entend consolider les bases d’une bonne gouvernance à l’échelon central et local. L’amélioration du cadre législatif et politique contribuera à créer l’espace requis pour un secteur public plus collaboratif, plus viable et plus inclusif, posant ainsi les jalons d’un engagement citoyen plus systématique dans les affaires publiques. Parce qu’elles créent les structures d’une gouvernance participative sur un terrain pratiquement vierge, ces réformes vont contribuer à renforcer la confiance entre l’administration et les citoyens. Elles apporteront aussi une réponse directe à la population, qui réclame de la part de ses dirigeants une transparence accrue et davantage de responsabilité sociale.
L’introduction de budgets fondés sur les résultats confortera l’impact des politiques, tout en améliorant la redevabilité du gouvernement vis-à-vis de la population et des partenaires extérieurs, vis-à-vis des politiques suivies et de l’utilisation des ressources allouées à cet effet. La nouvelle approche de gestion budgétaire renforcera l’efficacité globale des administrations publiques, en accordant aux administrateurs plus d’autonomie pour affecter les ressources aux besoins, à travers une plus grande responsabilisation et une flexibilité accrue des modalités de gestion. Parce qu’elle améliore la transparence, la nouvelle présentation du budget par programme confortera également la redevabilité des pouvoirs publics, et permettra de mieux aligner les dotations sur les priorités politiques.
La poursuite de la décentralisation budgétaire entretiendra également des liens importants avec d’autres volets du projet. C’est vrai notamment des réformes budgétaires et de la gestion des finances publiques qui auront un impact sur la gestion des finances locales, comme de la réforme du mode de gouvernance visant à accroître la participation citoyenne. En donnant du pouvoir à des autorités locales élues au suffrage direct, les réformes modifieront profondément la gestion publique des affaires locales, au profit d’une participation et d’une redevabilité accrues. Les autorités locales étant en première ligne pour la fourniture de services aux citoyens, ces réformes les pousseront à mieux s’adapter aux besoins locaux.
Sous réserve d’une application réussie, ces trois réformes devraient, ensemble, améliorer l’efficacité des politiques et des programmes publics du Maroc et contribuer ainsi à la résolution des difficultés socio-économiques persistantes du pays. Plus de 49 % des jeunes Marocains ne font pas d’études ou sont au chômage, alors même que la croissance économique et le niveau d’investissements publics sont soutenus. Le taux d’alphabétisation des adultes reste médiocre, à seulement 56 % pour les hommes en 2010 (la proportion étant bien moindre pour les femmes). Dans les zones rurales, 40 à 50 % seulement des élèves du primaire vont au terme de ce cycle de six ans (les filles étant là encore plus mal loties).
Cette situation et le manque d’efficacité des politiques de développement du passé ont nourri un sentiment général de privations et de frustration, qui s’est exprimé avec force dans les rues du pays. Le succès de la transition est donc tributaire de l’efficacité du processus actuel de réformes pour résoudre les problèmes d’exclusion sociale et économique. Ce processus doit être en mesure de répondre aux attentes légitimes de la population pour des conditions de vie meilleures et pour le droit à se prononcer sur l’avenir du pays.
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