Publié sur Voix Arabes

Résoudre la pénurie d’eau à Beyrouth

Water 037
Patrick Abi Salloum / Banque mondiale

A maints égards, la ville de Beyrouth est la capitale de la résilience et de la générosité. Au fil des siècles, elle a été le berceau de civilisations et de cultures très diverses, et l’est toujours jusqu’à nos jours. Actuellement encore, elle doit s’armer de résilience face à une succession de crises. 

L’eau, élément fondamental à la vie, manque cruellement aux habitants de Beyrouth malgré toutes les ressources hydriques dont le Liban bénéficie. Les rues de la ville en témoignent : elles sont souvent congestionnées par des camions-citernes d’eau dont le ronronnement des moteurs se mêlent aux bruits de la ville. Cette insuffisance de distribution de l’eau au Liban touche 1.6 million de personnes à Beyrouth et dans la région du Mont-Liban. La crise affecte particulièrement les quartiers les plus pauvres où vivent environ 460 000 habitants disposant d’un revenu inférieur à quatre dollars par jour. Ils doivent se contenter de quelques heures d’eau potable distribuée par jour. Dans certains quartiers, l’eau potable n’est distribuée que trois heures par jour en été, quand le besoin est le plus critique. 

Je vis maintenant depuis plus d’un an à Beyrouth et j’ai remarqué que chaque habitant avait sa propre stratégie pour remédier à la pénurie d’eau. La plupart achètent des bouteilles d’eau, à des prix exorbitants, ou bien s’approvisionnent en eau auprès de citernes privées, un pratique devenue courante à Beyrouth. Le coût élevé de l’eau touche les plus pauvres de plein fouet. Les familles dépensent généralement jusqu’à 15 % de leur revenu mensuel en eau, des sommes détournées de besoins tels que la scolarité des enfants et les soins médicaux. 

L’ironie de la situation est que la solution à la crise de l’eau au Liban est à quelques kilomètres de Beyrouth, dans le massif montagneux côtier. La plus grande partie des réserves d’eau douce du Liban se trouve dans ses cimes enneigées ou bien s’infiltre dans le sol pour alimenter des milliers de puits qui desservent la capitale et ses environs. Malheureusement, chaque année, l’excédent d’eau se déverse dans la mer au lieu d’être capté et acheminé vers les habitants pour les approvisionner en eau potable. 

Le gouvernement libanais, la société civile, les experts universitaires et les partenaires internationaux cherchent depuis des années les meilleurs moyens pour résoudre cette crise de l’eau. Dans les années 1950, le gouvernement libanais avait déjà décidé de recueillir une partie de l’eau de pluie, abondante au Liban, en érigeant un barrage près de la ville de Bisri afin de l’acheminer vers la zone de Beyrouth et du Mont-Liban. 

Ce projet, soutenu par la Banque Mondiale, prévoit d’acheminer l’eau douce naturellement, par traction gravitationnelle, le long d’un tunnel de 26 kilomètres. Ces eaux seront ensuite traitées à la station d'épuration de Wardaniyeh pour en garantir la qualité avant distribution aux habitants. 

Ces derniers mois, certains ont fait part de leurs inquiétudes quant à la sécurité du barrage envisagé à Bisri et à son impact sur la biodiversité et l’environnement. Deux panels d’experts internationaux indépendants ont été nommés pour examiner les aspects de sécurité et socio-environnementaux du projet. Le Conseil libanais pour le développement et la reconstruction (CDR), organe chargé de l’exécution du projet, a organisé une concertation avec les citoyens libanais et les organisations de la société civile autour du projet de Bisri. De son côté, la Banque mondiale, a rencontré régulièrement les organisations non gouvernementales. Il y a une semaine, une commission d’inspection indépendante, affiliée à la Banque Mondiale, a conclu que la Banque mondiale s’était conformée à ses politiques et procédures en accordant un soutien financier à ce projet, dans le cadre de son action dans le domaine des ressources hydriques au Liban. 

Le projet du barrage de Bisri est sans conteste un projet de développement vital qui bénéficierait à de nombreux Libanais, notamment les plus pauvres. La Banque mondiale maintient son partenariat avec le gouvernement libanais et le CDR et s’engage à poursuivre avec les Libanais un dialogue ouvert et inclusif à ce sujet. 

La Banque mondiale est fière de la relation unique qu’elle entretient avec le Liban et se déclare prête à le soutenir pour mettre en valeur certaines de ses ressources naturelles de manière durable. Elle réitère son engagement à servir le peuple libanais tout en respectant et en sauvegardant son paysage naturel et son tissu social, de la manière la plus durable et la plus sécurisée. 

Cette responsabilité nous tient d’autant plus à cœur que ce projet a été conçu pour bénéficier à tous les habitants, en particulier ceux qui ne sont pas en mesure d’assumer des dépenses supplémentaires dans les circonstances actuelles. Notre priorité est le développement et notre but central est de soutenir les citoyens libanais et de les faire bénéficier des projets de développement en veillant à ce que l’eau potable parvienne dans chaque foyer. 

Pour plus d’informations concernant le projet de Bisri, veuillez visiter notre site web en anglais www.worldbank.org/en/programs/bisri-dam ou en arabe www.albankaldawli.org/ar/programs/bisri-dam

L’auteur est le Directeur Régional pour le Machreq à la Banque Mondiale.

Auteurs

Saroj Kumar Jha

Global Director, Water Global Practice

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