Du 27 au 31 Août 2017, la capitale suédoise, Stockholm, accueillera la Semaine mondiale de l'eau, conférence annuelle organisée par la Banque mondiale et dédiée à l’eau et à sa gestion. Une séance spéciale sera consacrée Mardi 29 Août à la gestion des ressources hydrauliques dans la région du Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA), où la pénurie eu eau se fait de plus en plus aiguë. Cette séance sera également dédiée au lancement du nouveau rapport de la Banque mondiale intitulé « Au-delà des pénuries : la sécurité de l’eau au Moyen-Orient et en Afrique du Nord ». Mme Charafat Afilal, secrétaire d'État marocaine chargée de l'eau, qui participera à cette session, partage avec nous ses réflexions sur les défis de la gestion de l'eau dans le Royaume.
De par sa situation géographique, le Maroc est caractérisé par un climat contrasté et une pluviométrie variable selon les régions et les saisons. Pour accompagner le développement du pays et rationnaliser la gestion de l’eau, le Maroc s’est engagé depuis des décennies dans la voie de la maîtrise de ses ressources en eau à travers la réalisation d’importantes infrastructures hydrauliques (barrages, systèmes d’irrigation sobres en eau etc) pour assurer ses besoins aussi bien pour la consommation domestique qu’industrielle ou agricole.
Derrière ce succès indéniable, on relèvera les réalisations suivantes :
- Une politique de planification à long terme lancée au début des années 1980 qui permet aux décideurs d’anticiper les pénuries en donnant aux pouvoirs publics une visibilité sur la disponibilité des ressources en eau sur un horizon de 20 à 30 années.
- Des avancées importantes dans le domaine réglementaire et institutionnel pour améliorer l’efficacité de la gestion de l’eau à travers le territoire. Cela concerne l’adoption de lois essentielles comme la Loi 10-95 pour la gestion intégrée, participative et décentralisée des ressources en eau à travers la création des agences de bassins hydrauliques et la mise en place de mécanismes de protection des ressources en eau.
- Le développement des compétences techniques et de recherche scientifique au sein des agences concerneés aussi bien au niveau central que local.
Grâce à ces politiques et à ces investissements, le Maroc compte aujourd’hui 140 grands barrages avec une capacité de plus de 17.6 milliards de m3 et plusieurs milliers de forages et de puits pour capter les eaux souterraines. Cela a non seulement permis d’assurer la sécurisation de l’approvisionnement des populations en eau potable mais aussi le développement d’une irrigation moderne à grande échelle (près 1.5 million d’hectares) pour répondre aux ambitions de croissance d’un secteur agricole de plus en plus compétitif. Ces politiques comprennent également des systèmes intégrés de gestion de risques à travers une meilleure protection des populations et des biens contre les inondations ainsi qu’une exploitation de l’eau à des fins de production d’énergie hydro-électrique.
Néanmoins, le secteur de l’eau reste confronté à des défis majeurs liés à la raréfaction des ressources en eau, à l’accentuation des phénomènes climatiques extrêmes (inondations et sécheresses) sous l’effet du changement climatique, à l’inadéquation des ressources avec des besoins en eau croissants, ajoutée à une surexploitation des ressources en eau souterraine.
Pour relever ces défis et assurer la sécurité en eau du pays, le Plan National de l’Eau (PNE), stratégie de référence de la politique de l’eau au Maroc a été mise au point en 2015, articulé autour de trois axes:
1. Gestion de la demande en eau et valorisation de l’eau :
En matière d’alimentation en eau potable, en plus des objectifs de généralisation de l’accès à l’eau potable, le gouvernement a travaillé sur l’amélioration des rendements des réseaux de distribution d’eau potable en adoptant un programme d’économie d’eau potable qui consiste essentiellement en la réalisation des travaux de réhabilitation des réseaux de distribution, l’amélioration du comptage, l’entretien et la maintenance des réseaux, des travaux de sectorisation et de restructuration, la recherche et la réparation des fuites.
Dans le domaine agricole, le Plan Maroc Vert a permis de donner le cadre institutionnel adéquat et l’élan nécessaire pour mobiliser les ressources financières et techniques afin de moderniser le réseau d’irrigation dans le secteur agricole. Ainsi dans le cadre du PNE, le programme de reconversion à l’irrigation localisée prévu par le Plan Maroc Vert à l’horizon 2020, sera poursuivi jusqu’à l’horizon 2030 dans un objectif d’atteindre 70% de la superficie irriguée globale. En effet, actuellement une superficie totale a été reconvertie à l’irrigation localisée de l’ordre de 450 000 ha avec une moyenne de 50 000 ha/an.
Pour une meilleure valorisation des ressources en eau, le gouvernement a accéléré le programme d’aménagement hydro-agricole à l’aval des barrages existants ou en cours de réalisation. Ce programme permettra de valoriser les volumes régularisés non encore utilisées dans l’irrigation, en grande partie par le barrage Al Wahda.
2. Développement de l’offre à travers l’accumulation des eaux de surface par les barrages, le recours au dessalement de l’eau de mer, la réutilisation des eaux usées épurées et la possibilité de transférer l’eau à partir des bassins excédentaires du Nord-Ouest vers les bassins déficitaires du Centre-Ouest.
3. Préservation des ressources en eau et du milieu naturel et adaptation aux changements climatiques par la préservation de la qualité des ressources en eau, la gestion durable des eaux souterraines, l’aménagement des bassins versants et la sauvegarde des zones sensibles (zones humides et oasis).
Le PNE comprend également un volet lié à la protection contre les inondations et la lutte contre les effets de la sécheresse, pour répondre au défi d’adaptation au changement climatique et mieux maîtriser les phénomènes naturels extrêmes.
En matière réglementaire et pour assurer la mise œuvre du PNE, l’arsenal réglementaire et législatif continue d’être renforcé, notamment avec l’adoption en août 2016 d’une nouvelle loi sur l’eau (n° 36-15) qui poursuit les objectifs de la Loi 10-95 et fixe les règles d’une gestion intégrée, décentralisée et participative des ressources en eau en vue de garantir le droit des citoyennes et des citoyens à l’accès à l’eau. Ainsi cette nouvelle loi a introduit des réformes visant essentiellement la consolidation et le renforcement de la gestion et la planification décentralisée, intégrée et participative des ressources en eau, le renforcement des instances et organes de concertation et de coordination par la création du conseil de bassin hydraulique, la mise en place des bases juridiques pour la diversification de l’offre à travers le recours aux ressources en eau non conventionnelles notamment le dessalement de l’eau de mer, la mise en place des systèmes d’information liés à l'eau, le renforcement du cadre institutionnel et des mécanismes de protection et de préservation des ressources en eau et le renforcement des instruments financiers pour le développement du secteur de l’eau: préleveur-payeur/pollueur-payeur.
Avec ces avancées importantes et le renouvellement continu de la politique de l’eau, le Maroc a réussi à anticiper sur les actions à entreprendre afin d’assurer la sécurité hydrique du pays même en périodes de sécheresse. Ces efforts doivent être poursuivis pour accompagner le développement socio-économique surtout face aux nouveaux enjeux liés au changement climatique, et ce à travers l’engagement de tous les acteurs, le partage des expériences et le renforcement de la coopération internationale dans le domaine de l’eau.
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