Le Groupe inter-agences pour l’estimation de la mortalité maternelle (MMEIG) a publié aujourd'hui un rapport sur la mortalité maternelle dans le monde et par pays pour 2013. À l'échelle mondiale, le taux de mortalité maternelle a reculé, passant de 380 décès pour 100 000 naissances en 1990 à 210 en 2013.
Si cette baisse de 45 % est très inférieure aux 75 % attendus sur la période 1990-2015 (cf. OMD n°5), on constate néanmoins que cet objectif a été atteint dans 19 pays : Bélarus (96 %), Maldives (93 %), Bhoutan (87 %), Cambodge (86 %), Israël (84 %), Guinée équatoriale (81 %), Pologne (81 %), République démocratique populaire lao (80 %), Roumanie (80 %), Bulgarie (78 %), Timor-Leste (78 %), Érythrée (77 %), Cap-Vert (77 %), Lituanie (77 %), Oman (77 %), Liban (76 %), Népal (76 %) et Rwanda (76 %).
Le rapport souligne également le fait que, parmi les 183 pays et territoires couverts, le taux de mortalité maternelle n'a pu être calculé directement à partir des données de l'état civil que dans 67 pays, principalement à revenu élevé (figure 1).
Dans les autres pays, les estimations du taux de mortalité maternelle s'appuient sur un modèle de régression à plusieurs niveaux. Or, les marges d'incertitude liées aux méthodes statistiques utilisées sont tellement importantes que celles-ci ne peuvent pas être exploitées dans le cadre du suivi et de l'évaluation à court terme des programmes de santé maternelle (tableau 1).
Les modèles statistiques ne fournissent pas non plus d'estimations au niveau infranational suffisamment fiables pour permettre de planifier et mettre en œuvre ces programmes. Les estimations de la mortalité maternelle qui reposent sur des enquêtes réalisées auprès des ménages comme les enquêtes démographiques et sanitaires (DHS) ont un certain nombre de biais (notamment en comptabilisant les décès liés à la grossesse et non à l'accouchement, ou en fournissant des estimations portant sur plusieurs années antérieures à l'enquête et non sur l'année de référence [tableau 1]). Tout en prenant cela en considération, le MMEIG intègre les données issues des DHS à un modèle statistique pour obtenir des estimations plus fiables. Cela peut parfois mettre certains pays dans l'embarras quant aux estimations qu'ils doivent utiliser dans les rapports officiels.
Figure 1. Source des données utilisées pour l’estimation de la mortalité maternelle en fonction des pays, 2013
Tableau 1. Comparatif entre les estimations du taux de mortalité maternelle du MMEIG pour 2013 et celles des DHS pour 2012a
C’est pourquoi il est indispensable que tous les pays s’emploient à renforcer leur gestion de l'état civil, afin de collecter des données régulièrement mises à jour sur les taux de mortalité maternelle et infantile, ainsi que d'autres données essentielles au suivi des performances des systèmes de santé ou de la progression vers la couverture santé universelle.
De fait, les 116 pays présentés dans la figure 1 ont peu de chances de satisfaire aux recommandations de la Commission d'information et de responsabilisation pour la santé de la femme et de l'enfant, selon lesquelles « à l'horizon 2015, tous les pays auront entrepris des actions significatives pour établir un système d'enregistrement des naissances, des décès et des causes de décès, et auront des systèmes d'informations sanitaires efficaces regroupant des données issues des structures de terrain, des administrations et des enquêtes ».
Mesurer le taux de mortalité maternelle, c'est-à-dire le nombre de décès maternels survenant pour 100 000 naissances au cours d'une période donnée, nécessite d'enregistrer systématiquement toutes les naissances et tous les décès (et la cause de ceux-ci). En matière d'enregistrement des naissances, par exemple, on pourrait facilement atteindre un niveau similaire à d'autres services de santé comme la vaccination et les soins prénatals. Comme l'indique la figure 2, la couverture de l'enregistrement des naissances a tendance à accuser un retard considérable par rapport aux soins prénatals et à la vaccination contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite (DTP). Les services de santé maternelle et infantile existants pourraient par conséquent servir de points d'entrée pour améliorer l'enregistrement des naissances : ils sensibiliseraient les femmes enceintes à l’occasion des soins prénatals, procéderaient à l'enregistrement immédiat de toutes les naissances ayant lieu en milieu hospitalier et s’assureraient que tous les nourrissons sont bien enregistrés au moment de leur vaccination DTP à l’âge de six semaines. De plus, l'enregistrement des naissances pourrait être intégré à la liste des indicateurs utilisés dans les programmes de financement conditionnés aux résultats. Par ailleurs, afin de collecter les données requises dans le domaine de la mortalité maternelle, il faut mettre en place des systèmes de surveillance des décès liés à la grossesse ou à l’accouchement.
La Banque mondiale, en collaboration avec un certain nombre d'autres partenaires de développement (la BAsD, la BAfD, l'Union africaine, le FBMG, le ministère canadien des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement, le CDC, la LCPE, le CGDEV, la BID, PARIS21, Plan International, Statistic Norway, la fondation Every Woman Every Child des Nations Unies, la division statistique des Nations Unies, l'UNECA, la CESAP, la CESAO, le FNUAP, le HCR, l'UNICEF, l'USAID, et l'OMS) et de représentants des États (Bangladesh, Burkina Faso, Éthiopie, Mozambique et Philippines), développe actuellement une initiative destinée à intensifier les investissements dans l’enregistrement des faits d’état civil. L’objectif de ce plan 2015-2025 est de mobiliser l’action et des ressources supplémentaires en faveur de cet enjeu dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Ce plan sera lancé avant le sommet de Toronto, intitulé Sauver chaque femme, chaque enfant : un objectif à notre portée, qui se tiendra du 28 au 30 mai 2014.
Figure 2. L’enregistrement des naissances loin derrière les soins prénatals et la vaccination DPT, enquêtes DHS
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