Le développement du capital humain est essentiel pour une croissance soutenue et inclusive. La richesse des nations modernes ne dépend pas seulement de leurs ressources naturelles : elle dépend aussi de leurs ressources humaines. Cependant, les pays de la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) sont confrontés à des défis importants en termes d’éducation, de santé, et d’inclusion économique. Les trois graphiques suivants illustrent ces enjeux.
1. Le capital humain de la région CEMAC est nettement sous-exploité. L’environnement sanitaire et éducatif dans lequel grandira un enfant né aujourd’hui dans la région ne lui permettra de réaliser que 37 % de son potentiel, contre 40 % en Afrique subsaharienne. Les perspectives sont encore plus faibles pour les enfants vivant au Tchad et en République centrafricaine, ce qui met en exergue l’importante variation au sein de la région.
2. Les progrès en matière de développement du capital humain ont été limités. Les trois pays pour lesquels des données sont disponibles ont enregistré des améliorations très modestes, voire nulles, de leur indice de capital humain entre 2010 et 2020. Des politiques publiques plus efficaces et plus ambitieuses en matière d'éducation, de santé et de protection sociale sont nécessaires pour atteindre les résultats escomptés.
3. L'utilisation du capital humain est aussi inadéquate. La situation du capital humain de la CEMAC est encore plus préoccupante si l'on tient compte des taux d'emploi. Une personne née aujourd’hui dans la région a entre 15 et 28 % de chances de réaliser son potentiel et de devenir un membre productif dans la société.
Le capital humain au sein de la CEMAC : une nouvelle priorité
Face à ces défis, les chefs d’État de la CEMAC se sont fermement engagés lors du 15e Sommet extraordinaire à accroître les efforts pour développer le capital humain. Le Programme des réformes économiques et financières de la CEMAC (PREF-CEMAC) pour la période 2021-2025 intègre ainsi, pour la première fois, cette thématique comme nouvel axe de réformes prioritaires. Cette démarche représente une opportunité historique pour les pays de la CEMAC de réécrire le contrat social et de libérer leur potentiel de croissance.
En plus de souligner l'engagement partagé pour l'agenda du capital humain, l'initiative régionale permet également l'échange de bonnes pratiques entre les pays membres, le plus récent atelier ayant eu lieu à Yaoundé au mois de juin et réunissant tous les points focaux du capital humain de la CEMAC et autres ministères concernés avec de gros plans sur les défis liés au genre, à la pauvreté de l’apprentissage, aux compétences et à l’emploi, et au financement.
Les pays de la CEMAC tirent leur épingle du jeu
Des résultats ont déjà vu le jour :
Au Cameroun, le projet Filets sociaux a fourni des ressources à 385 000 ménages pauvres à travers le pays pour les aider à développer et à protéger leur capital humain. Le projet a également débouché sur le développement de crèches mobiles, qui ont permis à des enfants d’apprendre à parler et à compter, ainsi que sur la remise à chaque enfant d’un acte de naissance.
En République du Congo, grâce au projet LISUNGI, plus de 200 000 foyers pauvres et vulnérables ont bénéficié d’une aide financière. Un projet pilote est en cours pour développer un modèle de « mamapreneur » aidant les femmes à gérer des crèches qui offrent des services de garde d'enfants de qualité et abordables.
La République centrafricaine, quant à elle, cherche davantage à améliorer ses résultats d’apprentissage en redéfinissant les programmes scolaires du primaire autour de sa langue nationale : le sango.
Le programme SWEDD, à l‘échelle régionale, permet à des filles et femmes vulnérables de réaliser leur véritable potentiel tout en facilitant leur accès à une instruction de choix et à des services de santé reproductive, maternelle et infantile adéquats. Ce programme vient de débuter au Cameroun et commencera bientôt en République du Congo.
Beaucoup de chemin reste encore à faire…
Les pays membres doivent redoubler d’efforts pour concrétiser leurs ambitions communes. Le chantier est vaste, il est donc intéressant d’identifier cinq axes d’amélioration en vue d’orienter au mieux les décideurs politiques. Il est temps d’agir pour :
1. Accroître les investissements dans le secteur de l’éducation, dont la formation des enseignants, la construction et la rénovation des écoles, et l’élargissement de l’accès à une éducation inclusive et de qualité.
2. Améliorer l’efficacité du secteur santé, investir dans les infrastructures et les services de santé communautaires de base pour atteindre la couverture santé universelle dans la CEMAC.
3. Mettre en place des systèmes de filets sociaux inclusifs et pérennes pour protéger le capital humain des ménages pauvres et vulnérables en cas de chocs individuels et collectifs.
4. Promouvoir l’inclusion sociale et l’égalité des genres en favorisant l’éducation des filles, la lutte contre les violences faites aux femmes, l’engagement des jeunes et l’accroissement de leur participation à l’économie.
5. Encourager la participation du secteur privé à l’économie : le privé optimise le capital humain en créant des emplois, en investissant dans l’éducation et la formation des citoyens et en leur proposant des salaires compétitifs.
Si vous aussi êtes passionnés par les enjeux liés au Capital humain, ne manquez pas le lancement en direct du sommet des chefs d’Etat sur le Capital humain en Afrique qui se tiendra les 25 et 26 juillet à Dar es Salam en Tanzanie.
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