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L'inclusion sociale en Afrique : zoom sur les femmes et les filles

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Inclusion matters in Africa: A focus on women and girls Inclusion matters in Africa: A focus on women and girls

Au début de l'année, nous avons présenté à Nairobi le rapport L'inclusion sociale en Afrique, en partenariat avec la Commission nationale kényane pour l'égalité de genre (NGEC). Nous n'aurions pas pu espérer un auditoire plus averti et enthousiaste : plus d'une centaine de représentants du gouvernement, de la société civile et du secteur privé ont ainsi pris part à des discussions aussi animées que constructives. #InclusionMatters [le titre du rapport en anglais] a figuré au top 10 des hashtags les plus populaires dans le pays pendant la plus grande partie de la journée, ce qui témoigne de la pertinence de notre engagement en faveur de l'inclusion sociale sur le continent.

Pourquoi l'inclusion sociale est-elle si importante en Afrique ? Elle est essentielle parce que, alors que les pays africains ont fait des progrès impressionnants en matière de réduction de la pauvreté et de renforcement du capital humain au cours des dernières années, tout le monde n'en a pas bénéficié. Selon les prévisions, l'Afrique va progressivement devenir le continent concentrant le plus grand pourcentage de pauvres au monde, avec un taux passant de 55 % en 2015 à 90 % en 2030. Nous devons donc mieux comprendre qui est laissé pour compte et pourquoi.

En mettant l’accent sur l'inclusion, il s’agit d’identifier les groupes qui courent le plus de risques d'être exclus des progrès réalisés en Afrique. Par exemple, sur la base des enquêtes démographiques et sanitaires conduites dans neuf pays, notre rapport montre que l'origine ethnique influe sur le degré de richesse et que ses effets sont plus prononcés dans les zones rurales que dans les villes. Nous savons aussi que le sexe, l'âge, le statut matrimonial  et le handicap ont une incidence sur la pauvreté et sur d'autres aspects du développement humain.

Nous pensons que le succès remporté par le rapport réside dans le fait qu'il met en évidence les nuances de l'identité et la façon dont elles pèsent sur l'inclusion et l'exclusion. Prenons l'exemple des jeunes : la moitié de la population africaine a moins de 25 ans, c'est la population la plus jeune de toutes les régions du monde. Beaucoup de ces jeunes hommes et femmes sont des innovateurs, des dirigeants, des entrepreneurs, des bénévoles, des militants et des professionnels dans de multiples domaines. Parfois, ce sont d'anciens combattants. Le rapport se penche sur leur diversité et sur le fait que plusieurs facteurs identitaires peuvent parfois se superposer, avec pour effet de favoriser ou défavoriser encore davantage certains groupes. Par exemple, l'influence du sexe, de l'orientation sexuelle ou du handicap sur les perspectives et les résultats d'un individu varie en fonction du lieu où il vit ou de son statut socio-économique.

Le rapport met également en lumière la manière dont les violences faites aux femmes, les mutilations génitales féminines et les mariages précoces affectent l'inclusion et la réduction de la pauvreté.

S'il est un message fort dans notre rapport, c'est que l'inclusion est possible en Afrique. L’exemple des évolutions législatives est édifiant : l'Afrique est la région du monde qui a mis en œuvre le plus grand nombre de réformes visant à promouvoir l'égalité des sexes, avec 71 réformes au cours des dix dernières années (Les femmes, l'Entreprise et le Droit 2019). La plupart concernent l'introduction de lois relatives au harcèlement sexuel sur le lieu de travail et à la violence domestique. Récemment, le Mozambique et les Seychelles ont dépénalisé les relations entre personnes du même sexe. La Cour suprême du Botswana a statué en 2017 que la Constitution exige du gouvernement qu'il reconnaisse légalement l'auto-identification sexuelle des personnes transgenres.

Au Burkina Faso, non seulement le gouvernement a criminalisé les mutilations génitales féminines, mais il a formé des avocats, des juges et des policiers, et aussi soutenu des « patrouilles communautaires » dont l'objectif est de sensibiliser aux conséquences néfastes de ces pratiques. Toutes ces évolutions sont le fruit de l'action coordonnée des autorités, des organisations non gouvernementales, des communautés et de partenaires extérieurs.

La Banque mondiale compte au nombre des partenaires des pays africains dans la promotion de l'inclusion.

Le Cadre environnemental et social fixe des règles de transparence, de non-discrimination, de participation et de responsabilité, systématiquement applicables à l'ensemble du portefeuille de prêts et qui visent à élever d'un cran notre action en faveur de l'inclusion.

L'Association internationale de développement, à l'occasion de la 19e reconstitution de ses ressources (IDA-19), s'est engagée à poursuivre la lutte contre les nombreuses causes sous-jacentes de l'exclusion, allant du chômage aux inégalités hommes-femmes, en passant par les situations de fragilité, de conflit et de violence. L'inclusion des personnes handicapées sera également prise en compte de façon transversale dans le cadre d'IDA-19.

Enfin, voici un tour d’horizon de l'action de la Banque mondiale en faveur de l'inclusion en Afrique :

  • Au Sahel, le projet SWEDD soutient l’autonomisation des femmes et des adolescentes en leur ouvrant l'accès à des services de santé reproductive, maternelle et infantile  de qualité et en travaillant avec des acteurs locaux, notamment des chefs religieux.
  • Au Burundi, en République démocratique du Congo et au Rwanda, nous soutenons la mise en place de services pour lutter contre les violences sexuelles et sexistes.
  • Le sous-guichet régional de l'IDA pour l'aide aux réfugiés et aux communautés d'accueil déploie deux milliards de dollars pour appuyer les pays à faible revenu qui accueillent un grand nombre de réfugiés (IDA-18).
  • Au Nigéria, un projet dédié aux femmes est doté de 100 millions de dollars pour favoriser l'autonomisation économique féminine et, par là même, combattre les obstacles à l'égalité des sexes.
  • IDA-18 soutient la réinsertion des anciens combattants en République centrafricaine et au Mali. Ainsi en République centrafricaine, la Banque mondiale contribue au programme national de démobilisation, de réintégration et de rapatriement avec un financement de 30 millions de dollars de l'IDA pour la réinsertion socio-économique des ex-combattants. Une aide de même nature et d'un montant de 15 millions de dollars de l'IDA est mise en œuvre au Mali.
  • Le projet de soutien à l'agro-industrie, au renforcement de la productivité et à l’amélioration des moyens de subsistance au Nigéria garantit une proportion d'au moins 20 % de personnes handicapées parmi les bénéficiaires du programme d'autonomisation des femmes et des jeunes (WYEP). Le projet viendra en aide aux agriculteurs handicapés, notamment par la fourniture de technologies d'assistance.

Nous nous réjouissons des débats en cours sur l'inclusion en Afrique et nous attendons avec impatience vos commentaires et suggestions. N'hésitez pas à nous en faire part ci-dessous.


Auteurs

Simeon Ehui

Directeur régional pour le développement durable en Afrique, Banque mondiale

Ede Ijjasz-Vasquez

Ancien directeur principal du pôle Développement social, urbain et rural, et résilience, Groupe de la Banque mondiale

Maitreyi Bordia Das

Director, Trust Funds and Partner Relations, Development Finance (DFi)

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