Publié sur Nasikiliza

Pourquoi ça aide d’être une maman quand on travaille sur un projet de développement de compétences et d’emploi des jeunes femmes aux Burkina Faso ?

Cette page en:
Barry Aliman, 24 years old, rides her bicycle with her baby to collect water for her family, Sorobouly village near Boromo, Burkina Faso. For many women, regular childcare facilities are not an option for many women, given transportation difficulties and  limited time available. © Ollivier Girard, CIFOR  Barry Aliman, 24 years old, rides her bicycle with her baby to collect water for her family, Sorobouly village near Boromo, Burkina Faso. For many women, regular childcare facilities are not an option for many women, given transportation difficulties and limited time available. © Ollivier Girard, CIFOR

En 2016, le Burkina Faso a lancé un programme de formations courtes et d’emplois temporaires sur des chantiers publics dont 46 000 jeunes chômeurs ont bénéficié. N’ayant pas prévu que de nombreuses femmes postuleraient, le projet s’est rendu compte qu’elles devaient souvent jongler entre leur travail et la garde de leurs enfants.  Un constat qui a inspiré une initiative innovante de crèches mobiles pour accompagner les mamans d’un lieu de travail à un autre. D’autres pays envisagent maintenant d’adopter ce système facile à mettre en place et efficace. Rebekka Grun était chargée de ce projet du cote de la Banque mondiale.

Lorsque j'ai commencé à travailler au Burkina et sur le projet d'emploi et de développement des compétences des jeunes, j'étais une jeune mère et allaitais mon fils qui était encore un bébé. Les missions au Burkina Faso comportaient quelques aventures. Par exemple, je ne voulais pas jeter mon lait et souhaitais pouvoir le conserver pour le ramener à Washington DC en toute sécurité. J'ai essayé d'acheter des pains de glace mais je n'en ai trouvé dans aucun supermarché. Le chauffeur de l'équipe de la Banque mondiale a passé au peigne fin toute la ville de Ouagadougou et a finalement trouvé un paquet de pains de glace de qualité professionnelle dans une pharmacie. Il a ma reconnaissance éternelle.

Ma situation a eu l’avantage de me faire comprendre les difficultés que devaient vivre les bénéficiaires de notre projet qui étaient aussi de mamans, pour gérer leur temps et jongler entre les activités du projet et leur vie de mère. La lecture de la documentation technique et administrative du projet m’a interloquée.

Il y était énuméré toutes les choses qu’elles étaient censées faire : suivre une formation pour apprendre de nouvelles compétences, travailler parallèlement pendant six mois sur des chantiers publics pour gagner un revenu et, bien sûr, veiller à l’épanouissement et au développement cognitif de leurs enfants en âge d’aller à l’école tout en allaitant le plus jeune pendant un an. Je savais que cette combinaison était presque impossible pour tout le monde, et certainement impossible au Burkina Faso où les femmes ont en moyenne cinq enfants à charge. La tentation de laisser l'aîné garder ses frères et sœurs et nourrir le plus jeune avec quelque chose de moins adapté à son âge, pendant que la mère travaille, était naturellement élevée.

Certains manuels du projet et documents d'évaluation de son succès étaient illusoires. Il fallait faire quelque chose pour rendre le projet plus réaliste pour les femmes qui étaient obligées de gagner leur vie et n’avaient pas les moyens de faire garder leurs enfants.

Il m’est vite apparu qu’il était avant tout indispensable de mettre en place un système de garde d'enfants viable. Cela n’a pas été difficile de convaincre toutes les équipes impliquées dans la mise en œuvre du projet et l’idée de créer des crèches mobiles à proximité des chantiers de travaux publics qui employaient ces femmes a vite émergé.

Avec le recul, je suis reconnaissante de la mobilisation et de tous les efforts déployés pour concrétiser cette idées. Trois ministères (Éducation, Santé et Affaires sociales) plus les collectivités locales, ont contribué et apporté leur avantage comparatif. Oumar Barry, professeur et expert en matière de garde d'enfants s’est déplacé depuis le Sénégal pour venir nous aider à traduire notre conceptuelle et nos idées en quelque chose de fonctionnel et de qualité. Et tout cela de manière inclusive : il a commencé son travail en créant des groupes de discussion composés de bénéficiaires, d'homologues, de spécialistes, de représentants de l’État et des collectivités locales. En somme, il n'a laissé personne de côté et s'est assuré que les futures crèches répondent aux attentes des mamans et des employeurs.  

Au final, mis à part quelques murs, les crèches mobiles que nous avons réussi à créer, n’ont rien à envier aux crèches traditionnelles.

Je suis également reconnaissante que de nombreux collègues qui travaillent sur des projets sociaux dans d’autres pays me contactent régulièrement pour reproduire une version des crèches mobiles adaptée aux conditions locales de ces pays.

Mais surtout, cette expérience nous a appris que si nous voulons soutenir des programmes de développement efficaces, nous devons écouter attentivement les personnes visées par ces  programmes et adopter une approche plus participative . Nous devons avoir une compréhension complète de la situation réelle sur le terrain et nous assurer que les projets que nous finançons seront conçus pour réussir.

Installons des crèches mobiles sur tout le continent ! Veillons également à bien documenter les résultats et l'impact des projets que nous finançons , car ce sont des données tangibles sur lesquelles les gens peuvent revenir à tout moment.

Je serais heureux de partager mes idées et mes conseils sur la manière de reproduire cette initiative dans votre pays. N’hésitez pas à poser vos questions dans la section « commentaires ».

Vous trouverez ici tout ce que qu’il faut savoir sur les crèches mobiles au Burkina Faso.


Auteurs

Prenez part au débat

Le contenu de ce champ est confidentiel et ne sera pas visible sur le site
Nombre de caractères restants: 1000