À de multiples reprises ces dernières années, les gouvernements du monde entier ont reconnu que chaque pays devait absolument disposer en temps opportun de données désagrégées qui soient accessibles et fiables, afin de mesurer ses progrès et de veiller à ce que nul ne soit oublié dans la réalisation des Objectifs de développement durable. Tous se sont en outre accordés sur la nécessité de transformer plus activement les capacités statistiques des pays les plus pauvres.
Lancé en 2017, le Plan d'action mondial du Cap (CTGAP) sur les données relatives au développement durable définit les axes qui doivent permettre de mener à bien le renforcement des capacités statistiques en vue de moderniser et consolider les systèmes statistiques nationaux. Il incite les pouvoirs publics et la communauté internationale à mobiliser des ressources et à nouer des partenariats plus étroits pour améliorer les activités et programmes en matière de statistique, rénover les systèmes nationaux et favoriser la diffusion et l'utilisation des données.
Mais, presque cinq ans plus tard, une enquête sur la mise en œuvre de ce plan d'action (a), réalisée à l'échelle mondiale auprès des instituts nationaux de la statistique, dresse un tableau mitigé des progrès réalisés. D'après les résultats de l'enquête, qui viennent d'être publiés, il s'avère que, malgré des améliorations progressives, la transformation des capacités nationales telle que proposée dans le Plan d'action mondial (a) reste à accomplir, en particulier dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Il faut toutefois aussi souligner que les instituts nationaux ont poursuivi leurs activités en dépit des énormes contraintes imposées par la pandémie de COVID-19, démontrant ainsi leur solidité et leur résistance.
L'enquête a été menée en ligne en août et septembre 2021 conjointement par le Groupe de données sur le développement de la Banque mondiale, la Division de la statistique du Département des affaires économiques et sociales des Nations unies (UNSD) (a) et le Partenariat statistique au service du développement au XXIe siècle (PARIS21) (a). Les instituts statistiques de 101 pays ont participé à cette enquête, qui va permettre aux pouvoirs publics et aux partenaires internationaux de faire le point sur les efforts déployés dans la mise en œuvre, le suivi et le financement du Plan d'action mondial.
La première partie de l'enquête, qui a couvert des pays de tous niveaux de revenu, avait pour but de mettre en lumière les avancées réalisées dans les six domaines stratégiques définis par le Plan d'action mondial. La seconde partie, destinée aux pays à faible revenu pouvant bénéficier de l'aide de l'Association internationale de développement (IDA), interrogeait les instituts sur leurs perspectives et leurs besoins d'ordre financier.
Des réponses recueillies, il ressort des messages importants :
- La plupart des pays disposent d'un système de statistique en état de fonctionnement mais, dans près de la moitié d'entre eux, les lois applicables en la matière sont en vigueur depuis plus de dix ans. Une grande partie de ces règlementations ne prévoient donc pas de protection en matière d’accès aux données et de confidentialité des données personnelles. Dans le contexte d'un écosystème de données en évolution rapide, ces résultats soulignent la nécessité de tenir à jour les cadres juridiques qui régissent les systèmes statistiques.
- La coordination des activités de statistique entre les instituts et leurs partenaires au sein ou en dehors des systèmes nationaux s'est améliorée . Selon la grande majorité des réponses obtenues, de considérables progrès restent cependant possibles, surtout dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
- Parmi les capacités qu'ils doivent développer, les instituts nationaux placent en priorité la compilation et la diffusion de métadonnées, ainsi que l'élaboration d'une stratégie globale de libre accès aux données. À cet égard, près de neuf instituts sur dix déclarent qu'ils doivent, pendant les trois ans à venir, renforcer leurs plateformes et autres outils de diffusion de données en ligne , de même que leurs moyens de visualisation et de communication des données.
- Les deux tiers des instituts dans les pays IDA ont connu au cours du dernier exercice des retards modérés ou importants de décaissements budgétaires . Pour réaliser leurs programmes de travail, beaucoup étaient tributaires de l’aide au développement, laquelle a diminué pendant la pandémie.
- Pendant les trois prochaines années, les instituts de la plupart des pays IDA s'attendent à subir de très considérables manques de fonds pour les recensements des entreprises et exploitations agricoles comme pour ceux portant sur la population et le logement. Pour les instituts de statistique des pays IDA, la santé est le secteur qui doit bénéficier en premier d’un appui budgétaire ou extrabudgétaire.
Cette nouvelle enquête, qui complète les quatre volets d’un précédent sondage effectué pendant la COVID-19, n'offre qu'un état des lieux sur les capacités statistiques dans le monde. Pour suivre l'évolution de la situation, la Banque mondiale et les Nations unies, en coordination avec PARIS21, continueront à mener des enquêtes sur les efforts entrepris pour moderniser et consolider les systèmes statistiques nationaux.
Les résultats de l'enquête serviront en outre de base de travail à la Global Data Facility (a), administrée par la Banque mondiale, et à la plateforme Clearinghouse for Financing Development Data (a) du Bern Network, récemment créées afin de soutenir à long terme le développement des capacités statistiques dans le monde. L'aide sans précédent procurée par ces deux mécanismes innovants et partenaires permettra de promouvoir et faire avancer le chantier des données et d’accélérer la mise en œuvre du Plan d'action mondial. Plus largement, elle contribuera, d’une part, à la concrétisation du nouveau contrat social pour les données tel que dessiné par le Rapport sur le développement dans le monde 2021 : des données pour une vie meilleure et, d'autre part, à la réalisation du Programme de développement durable à l’horizon 2030.
Ce billet et le rapport (en anglais) ont été publiés simultanément sur les sites web de la Banque mondiale, de l'UNSD et de PARIS21.
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