Publié sur Opinions

Doing Business suscite des critiques erronées

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J’accepte volontiers les critiques et les commentaires à propos du rapport Doing Business — et, au demeurant, au sujet de tout autre produit de données ou de recherche de la Banque mondiale. Les récents billets de Justin Sandefur et Divyanshi Wadhwa sur les travaux de Doing Business consacrés au Chili et à l’Inde ne me paraissent toutefois ni instructifs ni utiles. En 2013, les auteurs d’une évaluation externe de Doing Business avaient recommandé, entre autres, d’élargir la gamme d’indicateurs pour mieux faire apparaître les obstacles entravant l’activité des entrepreneurs et accroître l’exhaustivité de Doing Business comme outil de comparaison au profit de la réglementation des entreprises. En conséquence, des indicateurs portant sur les différences entre les sexes, la fiabilité de l’approvisionnement en électricité et le « commerce transfrontalier » ont été soit ajoutés à la série d’indicateurs existants, soit sensiblement remaniés. Ces modifications ont été adoptées à l’issue de vastes consultations avec des universitaires et des représentants des autorités nationale ainsi qu’avec des membres du personnel, de la direction et du Conseil des administrateurs de la Banque mondiale. En raison de ces importants changements de méthodologie, nous avons déconseillé de comparer les classements au cours de l’année de la révision : un tel exercice serait revenu à comparer des pommes et des oranges. En outre, il aurait été impossible de comparer la même batterie d’indicateurs sur une période de deux ans, car les données nécessaires n’existaient tout simplement pas. Avant 2015, par exemple, la série d’indicateurs de Doing Business portant sur le commerce transfrontalier évaluait entre autres la quantité de pièces justificatives nécessaires pour satisfaire aux contrôles douaniers. Ce type d’information n’étant plus inclus dans la série d’indicateurs, les données correspondantes ne sont plus recueillies.

Le Chili et l’Inde

En dépit de ces lacunes en matière de données, Justin Sandefur et Divyanshi Wadhwa s’appuient sur diverses suppositions statistiques pour calculer les notes du Chili dans l’hypothèse où la méthodologie n’aurait pas été modifiée. Dans ce cas de figure, concluent-ils, les notes et le classement du Chili auraient été différents des notes et du classement résultant de la nouvelle méthodologie. Cette conclusion n’a rien de surprenant puisque les résultats enregistrés par le Chili (comme d’autres pays) au regard des indicateurs supplémentaires influent sur ses notes et son classement. Les auteurs du billet utilisent leur conclusion prévisible pour affirmer que les indicateurs de Doing Business « ne sont pas crédibles » en raison des variations statistiques massives provoquées par le changement de méthodologie. Je répète toutefois que ce changement a été introduit au terme d’une réflexion approfondie et de consultations de grande envergure. Il n’y aucune raison de réexaminer cette décision sous prétexte que le changement a modifié le classement d’un pays — par rapport au scénario de la méthodologie inchangée.

Dans leur billet sur l’Inde Justin Sandefur et Divyanshi Wadhwa constatent que la modification du classement de l’Inde est due non pas au changement de méthodologie, mais à l’ajout de plusieurs pays dans l’échantillon. Cependant, tout classement n’est-il pas l’illustration de la performance d’un pays par rapport aux autres États inclus dans l’échantillon ? Lorsque l’athlète Usain Bolt termine à la première place du 100 mètres, il est premier par rapport aux autres participants de l’épreuve — et non pas en comparaison d’un groupe hypothétique de concurrents. C’est un point sur lequel nous cessons d’insister dans le contexte de la publication du classement de Doing Business —notamment à l’intention des pays qui ont entrepris de nombreuses réformes, mais conservent le même rang parce que d’autres pays situés dans la même zone du classement ont fait encore mieux.

J’ajouterai que l’Inde a sensiblement accéléré le rythme de ses réformes durant les quatre dernières années. Au cours de l’année écoulée, elle figurait parmi les trois seuls pays au monde à avoir mis en œuvre huit réformes en une seule année. Je précise que Doing Business n’a ajouté qu’un pays (la Somalie, classée au 190e rang) à son échantillon pendant les quatre dernières années. En d’autres termes, les résultats de l’Inde mesurés par Doing Business peuvent être attribués directement aux réformes mises en œuvre.
 
Il est possible de formuler de multiples et importantes critiques à l’encontre de Doing Business, mais elles n’incluent pas le fait d’imputer l’évolution des notes et du classement aux changements de méthodologie ni à la modification de l’échantillon de pays.

Ce blog a été publié initialement dans la rubrique Views from the Center du site Center for Global Development : https://www.cgdev.org/blog/wrong-criticisms-doing-business


Auteurs

Shanta Devarajan

Teaching Professor of the Practice Chair, International Development Concentration, Georgetown University

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