Publié sur Opinions

Se laver les mains avec du savon : un geste qui sauve des vies

Se laver les mains pour vaincre la pandémie de coronavirus Se laver les mains pour vaincre la pandémie de coronavirus

« Lavez-vous les mains avec du savon » : ce conseil peut paraître simpliste et bien insuffisant à l’heure où la propagation inexorable de l'épidémie de Covid-19 dans le monde fait la une de tous les médias. Il doit bien y avoir un moyen plus élaboré de lutter contre le nouveau coronavirus ?

Certes, mais le lavage des mains au savon est l’un des gestes fondamentaux que chacun de nous peut accomplir pour freiner la transmission du coronavirus au sein des communautés et des familles , ainsi que dans les centres de santé, les écoles et les autres lieux publics. C’est aussi un geste barrière contre un grand nombre d’autres maladies infectieuses qui causent des millions de décès chaque année, comme la diarrhée, le choléra et la typhoïde.

Mais un geste banal qui reste hors de portée pour quelque 3 milliards de personnes dans le monde qui ne disposent pas chez elles d’une installation de base pour se laver les mains (a), sachant que la situation est particulièrement critique en Afrique subsaharienne.

Se laver les mains, mais aussi nettoyer et désinfecter les surfaces où les germes et les virus peuvent subsister, suppose d’avoir facilement accès à une source d’eau salubre et fiable . On estime que 785 millions d’individus à travers le monde ne disposent pas de services d’eau de base et que plus de 2 milliards sont privés de toilettes. 

Des services d’eau, d’assainissement et d’hygiène gérés en toute sécurité jouent un rôle décisif dans la prévention des maladies et la protection de la santé humaine en période d’épidémie infectieuse. Et l’une des stratégies les plus efficaces et rentables pour améliorer la préparation à une pandémie, en particulier lorsque les ressources sont limitées, consiste à investir dans des infrastructures de santé publique essentielles, ce qui comprend aussi les systèmes d’adduction d’eau et d’assainissement.

Or, bien trop souvent, ces services font défaut jusque dans les lieux censés accueillir les malades : selon un récent rapport (a), un centre de santé sur quatre dans le monde ne dispose pas de services d’eau de base, et plus d’un sur cinq ne possède pas de services d'assainissement.

Lors d’une épidémie infectieuse comme celle que nous connaissons actuellement avec le coronavirus, l’urgence est d’assurer rapidement un approvisionnement en eau fiable, salubre et à bas coût  pour les collectivités, les centres de santé et les écoles qui en sont privés. Une fois assurée la fourniture d’équipements fixes et mobiles pour se laver les mains, d’eau, de savon et de solutions hydroalcooliques, le levier de l’éducation et des interventions comportementales permettra de sensibiliser les populations à l’enjeu vital du lavage des mains.

Autre aspect crucial : apporter aux opérateurs d’eau et d’assainissement un soutien financier suffisant pour garantir la continuité des services, c’est-à-dire améliorer le suivi, renforcer les équipes et maintenir les opérations d’entretien. Si cette fonction n’est pas assurée, il faut entreprendre une évaluation de la situation et veiller à fournir rapidement ces services. Cela vaut notamment pour les pays en situation de fragilité, conflit et violence. Dans ces environnements difficiles, il est possible d’apporter des solutions rapides : fournir et faire tourner des stations d’épuration compactes, construire et faire fonctionner des points d’eau pour alimenter des sites stratégiques, acheminer par camion de l’eau en bouteille ou en sachets ou encore utiliser des réservoirs.

Le projet de santé et de nutrition d’urgence entrepris par la Banque mondiale au Yémen illustre bien les possibilités d’intervention rapide face à une épidémie (en l’occurrence de choléra) et aux enjeux de la préparation et de la prévention dans le contexte d’un conflit. Le projet s’attache à financer des opérations de chloration des sources d’eau et à prendre en charge les coûts de personnels essentiels pour assurer la poursuite des services et du fonctionnement des installations. La réalisation d’un diagnostic de la pauvreté sous l’angle de l’accès à l’eau et à l'assainissement (a), financé par le GWSP, a permis de plaider en faveur de l’octroi de deux financements de l’IDA dédiés à ce secteur dans le cadre du projet — soit une enveloppe initiale de 100 millions de dollars pour l’exercice 2018, à laquelle s’est ajouté un financement supplémentaire de 37 millions de dollars sur l’exercice suivant. Le GWSP (Programme mondial pour la sécurité de l’approvisionnement en eau et l’assainissement) a également permis la réalisation d’autres travaux analytiques, en apportant notamment des enseignements et des éclairages sur des aspects liés aux partenariats, à la résilience et à la chaîne de services.

En cas d’urgence épidémique, des moyens sont nécessaires pour garantir la poursuite des services d’eau, assainissement et hygiène. En effet, la qualité et la continuité de ces services risquent de pâtir lourdement des effets secondaires de la crise sanitaire : désorganisation des chaînes d’approvisionnement, déclin de l'activité économique, achats de panique... Apporter un soutien financier aux opérateurs d’eau et d’assainissement, assurer la disponibilité de produits chimiques et de combustibles pour traiter l’eau, fournir des services gratuits aux ménages et établissements qui en ont le plus besoin ou encore garantir la présence de savon et de désinfectants : ce sont autant d’interventions qui peuvent limiter la propagation de la maladie. 

Des services d’eau, d’assainissement et d'hygiène gérés en toute sécurité sont indispensables pour aider les pays touchés, à risque et à faibles capacités à renforcer leur résilience face au risque de pandémie. Plus largement, ces services peuvent permettre aux populations pauvres de se prémunir contre des pathologies ordinaires et meurtrières telles que les infections diarrhéiques, qui ont constitué en 2016 la deuxième cause de mortalité dans les pays à faible revenu en tuant plus de 60 personnes sur 100 000 habitants.

Améliorer l’accès à l’eau et à l'assainissement est par conséquent une étape essentielle pour renforcer durablement la santé publique et faire face à la crise actuelle. Chacun d’entre nous doit agir pour sauver des vies, à commencer par pouvoir se laver les mains.


VOIR AUSSI : L'actualité du Groupe de la Banque mondiale face à la pandémie de COVID-19


Auteurs

Luis Andres

Économiste principal, pôle Eau, Banque mondiale

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