On ne saurait trop insister sur l’importance de la bonne gouvernance à l’échelle de la planète. Sans elle, de nombreux gouvernements sont incapables d’assurer des services publics de qualité, l’offre d’éducation et de santé laisse souvent à désirer et la corruption fait des ravages, dans les pays riches comme dans les pays pauvres, en bridant la croissance et en réduisant les perspectives. Nous ne parviendrons pas à réduire l’extrême pauvreté – sans parler de l’éradiquer définitivement – sans résoudre ce problème.
La situation n’est pas désespérée pour autant. Les récents progrès obtenus sur ce front suggèrent d’ailleurs que nous sommes probablement à la veille d’une nouvelle ère. Les pays profitent d’une dynamique parmi les plus puissantes du monde actuellement pour améliorer les services et la transparence : je veux parler de la convergence entre la diffusion des technologies de l’information et les initiatives populaires en faveur de la transparence, de la redevabilité et de l’émancipation des citoyens. Dans certains cas, ce rapprochement est la première étape vers un gouvernement à la fois plus efficace et plus responsable.
Les Philippines font partie des pays adeptes de la bonne gouvernance. J’ai pu le constater lors d’un récent déplacement, en discutant avec le président Benigno Aquino. Évoquant avec force détails ses plans de lutte contre la pauvreté, de création d’emplois et d’installation d’une croissance économique sans exclus, il m’a redit combien l’amélioration de la gouvernance occupait une place centrale dans cette stratégie. Le gouvernement a ainsi ouvert l’accès aux données officielles et aux informations sur les marchés publics afin que les contribuables puissent juger de l’emploi de leurs impôts. Le Pôle pour la transparence de l’aide étrangère, créé après le passage du typhon Yolanda en 2013, permet de suivre en temps réel les engagements annoncés et les décaissements effectués en faveur de la reconstruction. Grâce à des instruments de géolocalisation, l’acheminement de l’aide aux victimes peut être contrôlé.
Ouverture des données budgétaires
L’ouverture fait des émules : aujourd’hui, de nombreux pays plutôt réputés pour leur goût du secret ouvrent leurs données et leurs budgets à l’examen du public. L’an dernier, le Groupe de la Banque mondiale a lancé un portail de données ouvertes sur les budgets, afin de recenser des informations sur les dépenses publiques des pays du monde entier. À ce jour, 13 ont publié l’intégralité de leurs bases de données – dont le Togo, premier État fragile à le faire.
En 2011, la Banque mondiale a aidé le Moldova à devenir le premier pays d’Europe centrale à créer un portail de données ouvertes et à publier ses dépenses en ligne. Aujourd’hui, les citoyens et la presse ont accès à plus de 700 séries de données et souhaitent que le gouvernement aille plus loin.
La Tunisie, berceau du Printemps arabe, vient de se doter d’une nouvelle constitution et prépare le premier portail de données budgétaires ouvertes de toute la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Elle s’emploie également à renforcer l’engagement de sa population à travers des plateformes citoyennes autour des questions budgétaires, comme Marsoum41, initiées par la société civile, dans le but de contribuer à la liberté d’information. Les requêtes peuvent être faites par le biais d’un téléphone portable.
Exploiter la technologie pour améliorer les services
Plusieurs pays s’appuient aussi sur la technologie pour optimiser la délivrance de services, publics et privés. En déployant des infrastructures de communication pour favoriser la généralisation des services électroniques – depuis les déclarations d’impôts en ligne jusqu’aux ordonnances médicales – l’Estonie s’est taillée une certaine réputation.
À La Paz, en Bolivie, un système de rétroaction citoyenne baptisé OnTrack permet aux habitants de l’un des quartiers les plus déshérités de la capitale d’envoyer par texto des commentaires ou des suggestions sur les services publics et de signaler un problème.
Au Pakistan, les services gouvernementaux du Penjab utilisent des smartphones pour recueillir des données en temps réel sur leurs fonctionnaires, avec photos et systèmes de géolocalisation, dans le but de lutter contre l’absentéisme et la gabegie.
Bonne gouvernance = économie en bonne santé
Ce ne sont là que quelques exemples des mesures prises par certains pays pour améliorer la prestation de services et renforcer la transparence. De plus en plus de dirigeants prennent conscience du lien entre bonne gouvernance et dynamisme économique – une perception étayée par des travaux de recherche qui suggèrent l’existence d’une corrélation forte entre institutions gouvernementales efficaces et croissance soutenue.
La bonne gouvernance est indispensable pour mettre fin à l’extrême pauvreté. Une transparence et une responsabilité accrues permettent aux citoyens de bénéficier de services éducatifs et sanitaires plus efficaces, de même qu’un secteur privé dynamique va créer des emplois de qualité pour aider des millions de personnes à s’extraire de la pauvreté.
Ne nous voilons pas la face : il reste encore beaucoup à faire pour endiguer la corruption et favoriser la bonne gouvernance. C’est pour cela que j’en appelle à votre expérience, si vous avez vécu de près le déploiement de programmes anti-corruption et de bonne gouvernance, dans un pays développé ou dans un pays en développement : dites-nous ce qui fonctionne et ce qui se révèle inefficace. Profitez de l’espace réservé à cet effet, ci-dessous, pour nous faire part de vos commentaires…
Ce billet a d'abord été publié sur LinkedIn Influencers (a).
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