Au fil d’une conversation où Jim Yong Kim et Ali Velshi (a) ont abordé de nombreux sujets, un thème est revenu sans cesse : celui des inégalités. De fait, la question prend de plus en plus d’ampleur, à mesure que les inégalités s’aggravent dans le monde.
Ali Velshi, animateur d’un magazine d’actualité économique sur Al Jazeera America (a), n’a pas tari de questions face au président du Groupe de la Banque mondiale : l’essor de la classe moyenne est-il un phénomène mondial, et cet essor est-il salutaire ? La réduction des inégalités passe-telle par une redistribution des richesses ? Comment le Groupe de la Banque mondiale peut-il progresser vers la réalisation de son double objectif — mettre fin à l’extrême pauvreté d’ici 2030 et promouvoir une prospérité partagée — alors que les obstacles sont si nombreux ?
Aucun pays ne peut se permettre de négliger l’aggravation des inégalités (a), a répondu Jim Yong Kim : « Il existe tout un ensemble de données fiables qui montrent qu’un niveau élevé d’inégalité est un frein à la croissance économique. Aussi, tandis que la croissance économique est au cœur des préoccupations, il faut se concentrer sur la réduction des inégalités. »
Parmi les indicateurs utilisés, le Groupe de la Banque mondiale suit l’évolution du taux de croissance du revenu des 40 % les plus pauvres dans les pays en développement. De nombreux gouvernants commencent à comprendre qu’« ils ne peuvent pas faire abstraction de ces 40 %, ne serait-ce que du point de vue de leur propre carrière politique », a ajouté Jim Yong Kim.
L’investissement dans l’humain, dans des secteurs comme l’éducation et la santé, est crucial, a-t-il souligné. Les habitants des pays en développement connaissent de plus en plus les conditions de vie des riches, et ils veulent eux aussi pouvoir accéder à de meilleurs services et à une vie meilleure. « Nous savons désormais que faute d’investir dans le capital humain, un pays ne pourra escompter une croissance économique ni à moyen terme, ni à long terme, ni même à court terme, peut-être », a renchéri le président de la Banque mondiale.
À ses yeux, l’extrême pauvreté est aujourd’hui « intolérable ». Y mettre fin à l’horizon 2030 sera un défi puisque cela suppose que près de 50 millions de personnes par an (soit un million par semaine pendant 16 ans) puissent s’en extirper.
« Notre priorité, c’est le partage de la prospérité. Il s’agit de sortir du dénuement extrême un milliard de personnes et de faire ainsi en sorte qu’elles aussi jouissent de ce niveau de vie recherché par tous », a précisé Jim Yong Kim.
Selon lui, les conflits (a)sont de « redoutables catalyseurs » de pauvreté. Le manque d’infrastructures dans les pays en développement pèse également sur la croissance économique. Onze millions de Belges ont à leur disposition autant d’électricité qu’un milliard d’Africains. Face à ce problème, le Groupe de la Banque mondiale cherche de nouveaux partenaires et tire parti de sa capacité financière pour « agréger » des financements de sources différentes.
Ali Velshi, qui arborait l’insigne « End Poverty » à sa boutonnière, a demandé au président de la Banque mondiale comment un slogan aussi simple pouvait se traduire par des résultats.
En partie par le lancement d’un mouvement social, a répondu Jim Yong Kim, qui, depuis sa prise de fonction, s’est nourri des idées d’experts et du grand public sur cette question. Sortir les personnes de la pauvreté est un objectif « important et impérieux », a-t-il insisté. Pour sa part, le Groupe de la Banque mondiale veut agir plus rapidement, exploiter les dernières innovations et « assigner ses meilleurs éléments » à l’élaboration de solutions qui transformeront la vie d’un milliard de personnes, a-t-il conclu.
Vous pouvez regarder à nouveau cet entretien ou en lire sa transcription (a).
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