La Coupe du monde de football débute aujourd’hui au Brésil. Enfin !
Pour les milliards de téléspectateurs de par le monde rassemblés en communion, l’événement sera synonyme d’intenses moments de gloire et de fiertés nationales, ou au contraire d’humiliation et d’indignation. Les buts et les décisions des arbitres susciteront encore des discussions animées des dizaines d’années plus tard entre aficionados du « beau jeu ». Mais l’une des facettes essentielles de ce rendez-vous incontournable tient au fait que la plupart des joueurs sont des migrants : certains jouent pour leur équipe nationale mais résident à l’étranger (c’est le cas de l’Argentin Lionel Messi, sélectionné dans l’équipe d’Argentine mais vivant en Espagne) ; d’autres pour une équipe nationale qui n’est pas celle de leur pays de naissance (ainsi, le Brésilien Diego Costa vit en Espagne et joue pour l’Espagne) ; et d’autres encore pour une équipe et pour un pays qui ne sont pas les leurs (le Polonais Miroslav Klose vit en Italie et fait partie de la sélection allemande).
Le Pew Research Center vient de publier un article (a) passionnant accompagné d’une infographie très bien faite sur les stars de la Coupe du monde 2014 et leurs équipes régulières. Conclusion, 476 des 736 footballeurs (65 %) qui feront le déplacement au Brésil avec leurs équipes nationales passent le reste de l’année dans des clubs sans lien avec le pays qu’ils représentent pendant la Coupe du monde. Dans le cas de la Bosnie-Herzégovine, de la Côte d’Ivoire, du Ghana et de l’Uruguay, un seul des 23 joueurs de la sélection nationale joue toute l’année dans son pays.
Dans le même ordre d’idées, le site d’information Quartz a publié un article (a) édifiant qui montre que 78 des joueurs représentant leur pays au Brésil n’y sont en fait pas nés. Dans l’équipe d’Algérie par exemple, 15 des joueurs sont nés en France… Quant à la sélection de la Suisse, un pays qui vient de se prononcer très clairement contre l’immigration, elle compte 6 joueurs nés à l’étranger.
L’article 7 du règlement d’application des statuts de la Fédération internationale de football association (FIFA) fixe les critères d’acquisition d’une nationalité par un joueur : celui-ci peut être aligné en sélection nationale s’il n’a pas joué pour une autre équipe nationale et s’il remplit l’une des conditions suivantes :
(a) être né sur le territoire de l’association concernée ;
(b) avoir sa mère ou son père biologique né(e) sur le territoire de l’association concernée ;
(c) avoir sa grand-mère ou son grand-père né(e) sur le territoire de l’association concernée ;
(d) avoir vécu sur le territoire de l’association en question au moins cinq années consécutives après ses 18 ans.
Quoi qu’il en soit, il y a de fortes chances pour que ces joueurs aient émigré de leur plein gré, de manière légale et sans se mettre en danger, et qu’ils aient ainsi pu réaliser un rêve. Les chercheurs du Pew Research Center parlent à leur propos de « l’élite des migrants du travail ». Les conditions extraordinaires d’accès et de mobilité dont ils bénéficient grâce à leur talent sont une forme idéale de migration, qui révèle, en creux, la situation de millions d’individus moins chanceux. Les stars du ballon rond qui illuminent la Coupe du monde 2014 au Brésil jouent pour tous les migrants de la planète… Quel symbole !
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