De prime abord, le SXSW n’a pas grand-chose à voir avec la plus grande institution d'aide au développement du monde. Pourtant, la créativité et la technologie, qui sont les deux principes fondateurs de ce festival, sont aussi souvent citées comme des éléments clés de l’action menée par le Groupe de la Banque mondiale pour relever les plus grands défis du 21e siècle. Et, de fait, avec l'édition 2015 du SXSW, qui comporte un certain nombre de tables rondes sur l’innovation, l’entrepreneuriat et la technologie dans les pays émergents, le programme d'action de la Banque mondiale pour le développement se rapproche plus que jamais de la passion des habitués d’Austin pour la technologie. Deux de ces tables rondes, organisées par infoDev (a), un programme de la Banque mondiale qui promeut l’innovation et l’entrepreneuriat dans le monde, sont consacrés aux profils de risque et de rendement des start-up technologiques africaines (a) et à l'écosystème de l’innovation dans les pays émergents (a).
Tout cela ne tient pas du hasard. L’économie numérique n’est plus l’apanage de la Silicon Valley, ni d'un festival high-tech aux États-Unis. Bien au contraire, elle est devenue une force essentielle de changement social à travers le monde, de l’Asie à l’Afrique. Par exemple, en Afrique subsaharienne, le secteur des technologies mobiles a contribué à l'économie à hauteur de 60 milliards de dollars en 2012, un chiffre qui devrait atteindre 119 milliards de dollars en 2020. Parallèlement, les investisseurs et les technologues de la Silicon Valley s’intéressent de plus en plus au potentiel grandissant du marché africain. Les systèmes de paiement mobile, les bitcoins ou l’impression 3D pourraient bien trouver leurs plus grandes opportunités de croissance en Afrique au cours des cinq prochaines années. De plus, le développement rapide de centres d’innovation et de pépinières d'entreprises que connaît le continent devrait le conduire à voir fleurir un nombre grandissant d’entrepreneurs talentueux capables de se saisir de telles opportunités. C’est l’avis de Toni Eliasz, codirecteur du programme d'appui à l’entrepreneuriat numérique (a) d’infoDev, pour qui les créateurs d'entreprise africains sont de plus en plus nombreux à dépasser le stade conceptuel pour transformer leurs idées en activités commerciales viables et susceptibles d’attirer les investissements.
Si nombre de start-up africaines ne sont pas encore en situation d'accéder au capital institutionnel, des investisseurs issus de la diaspora sont déjà en train de préparer le terrain en faisant des investissements relativement risqués. Des plateformes de financement participatif ( crowdfunding) comme Kickstarter et Indiegogo contribuent également à combler le fossé qui existe entre les jeunes entreprises africaines et les investisseurs. Le Centre d'innovation climatique au Kenya, une pépinière bénéficiant du soutien de la Banque mondiale, aide des start-up locales engagées dans les technologies propres à accéder à ce type de financement (a) — il s'agit là des premières campagnes de financement participatif dans ce secteur en Afrique de l’Est. Encore une fois, des concepts et des modèles économiques qui n’intéressaient jusqu’à présent que la Silicon Valley, trouvent désormais leur place dans des pays africains et rapprochent ainsi fortement les préoccupations du développement de l’écosystème mondial des jeunes entreprises innovantes.
Le SXSW comme la Banque mondiale ont bien compris toute l'effervescence des start-up technologiques (a), tant à Austin qu'à Nairobi. C’est là leur grand point commun. Cependant, les écosystèmes de l’entrepreneuriat africain ont encore bien du chemin à parcourir avant de pouvoir célébrer leur réussite à l'occasion d'un festival planétaire. Les start-up africaines manquent encore de capital humain tandis que les investisseurs occidentaux, en particulier les investisseurs institutionnels, sont encore à la recherche du modèle économique le plus à même de générer des bénéfices.
Le SXSW nous rappelle néanmoins que la passion de l’entrepreneuriat transcende les marchés, les cultures et les frontières, et que le temps est venu de vraiment aider les start-up africaines à passer à la vitesse supérieure.
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