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Les perspectives des marchés de produits de base en 8 graphiques

Les perspectives des marchés de produits de base en 8 graphiques Couverture du rapport.

Les prix des produits de base devraient connaître un léger repli en 2024 et 2025, tout en restant supérieurs aux niveaux pré-COVID. En ce qui concerne les produits énergétiques, les prix devraient baisser de 3 % en 2024, la baisse notable des cours du gaz naturel et du charbon compensant la hausse de ceux du pétrole. Cette tendance devrait se poursuivre, avec une baisse prévue de 4 % en 2025. Les prix des produits agricoles devraient également décliner cette année et l’année prochaine à la faveur d’une offre plus abondante. Enfin, les prix des métaux devraient rester stables en 2024, avant d’augmenter légèrement en 2025. Ces prévisions reposent sur l'hypothèse que le conflit au Moyen-Orient ne s’intensifiera pas. Les risques haussiers sont cependant prépondérants, en raison de la possibilité d’un embrasement du conflit et de ses conséquences sur l’approvisionnement énergétique.

Les prix des produits de base étaient en baisse de 3 % au premier trimestre 2024, sous l’effet de la décrue des cours de l’énergie et de la stabilité relative des cours des produits agricoles et des métaux. Les prix de l’énergie ont enregistré une baisse de 3 % au premier trimestre 2024 (par rapport au trimestre précédent), imputable principalement à la décrue des cours du gaz naturel et du charbon. Les cours pétroliers ont affiché une volatilité importante, sur fond de montée des tensions au Moyen-Orient et de resserrement des perspectives de l’offre. Du côté des prix des produits agricoles, on observe peu de variation, la baisse enregistrée dans les prix des denrées alimentaires et des engrais étant compensée par un renchérissement des boissons dû à des pénuries d’approvisionnement elles-mêmes induites par des conditions météorologiques défavorables. Les prix des métaux sont quant à eux restés globalement stables au cours du premier trimestre 2024, la baisse des cours du minerai de fer neutralisant les hausses des autres métaux.

Le prix du baril de Brent a franchi la barre des 91 dollars début avril, tiré à la hausse par l’intensification des tensions géopolitiques et les nouvelles coupes de production de l’OPEP+. Les cours du pétrole ont connu une volatilité importante dans un contexte marqué par les inquiétudes croissantes suscitées par le conflit au Moyen-Orient, le resserrement de l’offre lié aux réductions de production de l’OPEP+ et le renforcement de l’activité industrielle mondiale. Les récentes baisses des stocks aux États-Unis, conjuguées à la révision des projections de l’Agence internationale de l’énergie, dont les prévisions d’excédent d’offre ont laissé la place à un léger déficit, ont encore renforcé la confiance des marchés. L’évolution de la situation géopolitique au Moyen-Orient et les perturbations dans le secteur du raffinage en Russie depuis la mi-mars accentuent les craintes d’une instabilité accrue des approvisionnements en pétrole. Les cours pétroliers devraient s’établir en moyenne à 84 dollars le baril en 2024 (contre 83 dollars en 2023), avant de se tasser à 79 dollars en 2025.

Les prix du gaz naturel ont chuté au premier trimestre 2024 à des niveaux inférieurs de près de 40 % à ceux de l’année précédente. En raison de stocks élevés, le prix du gaz naturel sur le marché de référence européen a chuté de 35 % au premier trimestre 2024, annulant les gains enregistrés au trimestre précédent. La tendance est également à la baisse aux États-Unis (-22 %), sur fond de production nationale soutenue et de conditions météorologiques clémentes qui ont contribué à affaiblir la demande. En revanche, l’indice de référence pour le prix du gaz naturel liquéfié (GNL) au Japon a légèrement augmenté au premier trimestre 2024 (+4 %), à la faveur d’une reprise de la demande dans la région, en particulier en provenance de la Chine, qui est redevenue en 2023 le premier importateur mondial de GNL. Le déclin des prix du gaz naturel devrait se poursuivre en 2024 en raison de niveaux de stocks mondiaux conséquents et des ajustements en cours dans la structure des échanges, liés en particulier à la Russie. Les cours du gaz naturel devraient cependant repartir à la hausse en 2025, avec un rebond de l’indice de référence aux États-Unis, la mise en service de nouveaux terminaux entraînant une augmentation des exportations de GNL.

Les prix des produits agricoles ont légèrement augmenté début avril, à la suite de la montée des prix du cacao et du café robusta. Les cours des produits de base alimentaires ont baissé de 4 % au premier trimestre de 2024 (en glissement trimestriel), grâce à des conditions d’approvisionnement favorables et au niveau soutenu des exportations en provenance de la région de la mer Noire. En revanche, des conditions météorologiques défavorables, dues en partie au phénomène El Niño, ont entraîné les prix des boissons, et en particulier ceux du cacao et du café robusta, à des niveaux record à la fin du premier trimestre 2024 (cette tendance s’est poursuivie en avril). Les prix des denrées alimentaires devraient connaître une légère baisse en 2024 et 2025, en raison d’une offre favorable et de l’affaiblissement d’El Niño. L’indice des prix des boissons devrait bondir de 22 % en 2024 avant de diminuer en 2025 avec l’arrivée d’un supplément d’offre sur le marché. 

L’insécurité alimentaire reste une préoccupation urgente, en particulier dans les régions touchées par des conflits. Les conflits armés, les chocs économiques et les phénomènes météorologiques extrêmes sont les principaux facteurs d’insécurité alimentaire. La récente intensification du conflit au Moyen-Orient et ses répercussions ont aggravé l’insécurité alimentaire, en particulier dans les zones en proie aux violences. Le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire aiguë a fortement augmenté ces dernières années, pour passer de 100 millions en 2018 à plus de 282 millions en 2023.

Les prix des métaux sont restés relativement stables, dans un contexte marqué par une offre abondante et une demande atone dans les grandes économies. Après un ralentissement prononcé en 2023, sur fond de demande en berne dans les principales économies, les prix des métaux se sont stabilisés, avant de connaître une remontée notable au mois d’avril. Les cours du cuivre ont notamment atteint en avril leur plus haut niveau depuis deux ans, tirés à la fois par des inquiétudes sur des difficultés d’approvisionnement et par les signes de résilience de l’activité économique mondiale. L’indice des prix des métaux devrait rester relativement stable en 2024 avant d’augmenter régulièrement en 2025 à la suite du redressement de l’activité industrielle mondiale et d’une forte demande liée à la hausse de la production de technologies d’énergie renouvelable.

Les prévisions relatives aux prix des produits de base sont soumises à de nombreux risques, le principal étant la possibilité d’une intensification des conflits. L’aggravation des tensions géopolitiques a déjà un impact à la hausse sur les prix de certains produits de base. Le cours de l’or, baromètre de la demande de valeurs-refuges, a atteint un nouveau record en avril. Un embrasement du conflit au Moyen-Orient constitue le principal risque haussier pour la plupart des produits de base. Il pourrait entraîner des perturbations dans les approvisionnements énergétiques, dont le rôle est déterminant pour la production et le transport d’autres matières premières. D’autres facteurs risquent aussi de favoriser une hausse des prix, à savoir notamment une diminution de l’offre d’énergie aux États-Unis et d’éventuelles perturbations causées par des conditions météorologiques et climatiques défavorables qui affecteront tout particulièrement les produits agricoles. À l’inverse, les principaux risques à la baisse qui pèsent sur ces prévisions sont la possibilité d’une augmentation de l’offre des pays de l’OPEP+ et une croissance économique mondiale plus faible que prévu.


John Baffes

Économiste senior spécialiste de l'agriculture, Groupe d’étude des perspectives de développement, Banque mondiale

Kaltrina Temaj

Analyste-recherche au sein de la cellule Perspectives de la Banque mondiale

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