Publié sur Opinions

Quand les réfugiés seront-ils vaccinés contre la COVID-19 ?

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Photo d'une refugiée et de ses enfants. © Mohammad Hawari/UNHCR

Pour les populations les plus pauvres de la planète, la pandémie de COVID-19 est synonyme de catastrophe sociale et économique. Selon la Banque mondiale, jusqu’à 115 millions de personnes auraient basculé dans l’extrême pauvreté en 2020. La plupart vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, en particulier dans des zones fragiles et touchées par un conflit. Même l’espoir apporté par les avancées sur les vaccins est teinté d’incertitude : quand les populations vulnérables, dans le monde entier, pourront-elles en bénéficier ? 

Les réfugiés et les personnes déplacées à l’intérieur de leur pays, déracinés par les conflits, comptent parmi ces populations vulnérables. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), ils seraient désormais plus de 80 millions, soit l’équivalent de la population de l’Allemagne. En Jordanie, au Liban et en Iraq, la pandémie de COVID-19 a plongé dans la pauvreté un million de réfugiés syriens et 180 000 personnes déplacées, mais aussi plus de 4 millions d’habitants au sein des populations d'accueil. 

Aujourd’hui, 85 % des réfugiés vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire . La récession économique qui sévit actuellement aggrave les crises liées aux conflits, à la violence et à l’insécurité alimentaire qui poussaient déjà les communautés au bord du gouffre. Les infrastructures, les systèmes de santé, d’éducation et de protection sociale de ces pays ne sont pas en mesure de faire face à un choc d’une telle ampleur. Si l’aide humanitaire et l’aide au développement n’augmentent pas rapidement, ces pays risquent d’être durement et durablement déstabilisés.

Le désespoir des réfugiés est profond. Les équipes du HCR font état d’une recrudescence des cas d’automutilation et de suicide dans des pays aussi différents que l’Ouganda et le Liban, ce qui témoigne d’une souffrance psychique diffuse.  Pourtant, si on leur en donne la possibilité, de nombreux réfugiés sont capables et désireux de participer à la vie des communautés qui les accueillent. De la Jordanie au Pérou en passant par la France, des professionnels de santé réfugiés ont rejoint les rangs des intervenants de première ligne dans la lutte contre la pandémie.

En février dernier, avant la pandémie, la Banque mondiale estimait déjà que, dans dix ans, jusqu’à deux tiers des personnes vivant dans l’extrême pauvreté se trouveraient dans des pays en situation de fragilité et de conflit, où la réduction de la pauvreté régressait. Dans un contexte de conflits prolongés, quatre réfugiés sur cinq passent désormais cinq ans ou plus dans un pays d’accueil.

Depuis le début de la pandémie, le HCR et la Banque mondiale renforcent les services de santé, d’eau, d’assainissement et d’hygiène afin de protéger ceux qui sont contraints de fuir.  Ils collaborent avec les gouvernements des pays d’accueil pour que les personnes déplacées soient intégrées aux efforts de lutte contre la pandémie et de redressement économique.

Mais la crise économique exige d’intensifier les efforts : les personnes contraintes au départ ont plus que jamais besoin d’une aide à long terme. En 2019, plus de la moitié des 7 millions de réfugiés en âge de fréquenter l’école n’étaient pas scolarisés. Aujourd’hui, avec la fermeture des établissements scolaires due à la crise sanitaire, de graves pertes d’apprentissage risquent de priver une génération entière de perspectives d’emploi et d’espoir.

« Depuis le début de la pandémie, le HCR et la Banque mondiale renforcent les services de santé, d’eau, d’assainissement et d’hygiène afin de protéger ceux qui sont contraints de fuir. »

Les réfugiés qui bénéficiaient du meilleur accès aux marchés du travail se trouvaient généralement dans les villes, mais le coronavirus et la récession ont frappé durement les zones urbaines, où les travailleurs indépendants et informels en particulier subissent des pertes de revenus. Le choc social et économique pourrait engendrer de la violence, et déclencher de nouvelles vagues de déplacement. 

Les pays d’accueil ont tout intérêt à inclure les réfugiés et les personnes déplacées dans leurs efforts de relance et à leur permettre d’accéder aux soins, à l’éducation et au marché du travail.  Nombre d’entre eux font des efforts louables à cet égard. La Jordanie, par exemple, a inclus les réfugiés syriens dans sa campagne de vaccination nationale et le Liban vient de s’engager à faire de même. Les réfugiés n’ont pas de filet de sécurité, et même les données sur leur statut socio-économique font souvent défaut. Leur inclusion, que ce soit dans les statistiques nationales, dans les interventions d’urgence ou dans les efforts de relance à long terme, leur confère de la visibilité, et permet de comprendre l’ampleur du problème et de trouver des solutions.

« Les pays d’accueil ont tout intérêt à inclure les réfugiés et les personnes déplacées dans leurs efforts de relance et à leur permettre d’accéder aux soins, à l’éducation et au marché du travail. »

Cependant, il n’incombe pas aux seuls pays d’accueil d’investir dans les réfugiés.  Cela relève du bien commun, et les donateurs et les organisations multilatérales se sont engagés à assumer cette responsabilité partagée dans le cadre du Pacte mondial pour les réfugiés adopté par la communauté internationale en décembre 2018. Nous devons respecter cet engagement envers les réfugiés et les communautés d’accueil, dans l’esprit et dans les actes.

Cet article a été publié initialement sur le site de Thomson Reuters Foundation

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Le Groupe de la Banque mondiale et la pandémie de coronavirus (COVID-19)

La Banque mondiale et les fragilités, conflits et violences


Auteurs

Filippo Grandi

Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR)

Axel van Trotsenburg

Directeur général senior de la Banque mondiale, Politiques de développement et partenariats

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