Publié sur Opinions

4 mois après la COP21 à Paris, c’est l’heure d'agir et de faire les comptes

Le président Jim Yong Kim discute avec Ségolène Royal et Mark Carney © Dominic Chavez/Banque mondiale

La communauté internationale doit agir rapidement pour tenir les promesses de l’accord sur le climat obtenu à Paris voici quatre mois et accélérer les mesures en faveur d’une croissance sobre en carbone, a souligné Jim Yong Kim, président du Groupe de la Banque mondiale, en ouverture des Réunions de printemps.

En décembre dernier, plus de 190 pays se sont engagés à prendre leur part pour stopper le réchauffement climatique, d’où cet accord historique pour maintenir la hausse des températures en deçà de la barre des 2 °C par rapport à l’ère industrielle, l’objectif consistant à limiter ce réchauffement à 1,5 °C.


Dans une semaine, l’accord de Paris sera formellement signé. Le moment est donc venu de faire entendre avec force l’argument financier en faveur des énergies renouvelables, a indiqué Jim Yong Kim : « C’est un enjeu absolument vital. Nous devons agir aujourd’hui, sinon, nos enfants et nos petits-enfants seront tous, sans exception, les victimes de cette inertie ».

Jim Yong Kim s’exprimait lors d’un événement retransmis en direct, Accord de Paris : passons à l’action, aux côtés de la ministre canadienne de l’Environnement et du Changement climatique, Catherine McKenna (a), de la ministre française de l’Environnement, de l’Énergie et de la Mer, Ségolène Royal, du ministre marocain de l’Économie et des Finances, Mohamed Boussaid (a), et du gouverneur de la Banque d’Angleterre et président du Conseil de stabilité financière du G20, Mark Carney (a).

Le rédacteur économique de France 24, Markus Karlsson, animait une discussion consacrée à l’enjeu de la réduction des émissions de carbone et aux actions qu’il faudra mettre en œuvre, notamment en accélérant la transition vers les énergies renouvelables.

Pour Mohamed Boussaid, le monde a compris que l’on ne pouvait plus laisser aux générations futures la responsabilité de s’atteler au changement climatique. « Nous devons enclencher une dynamique irréversible », a indiqué celui dont le pays accueillera, en novembre à Marrakech, la prochaine conférence sur le climat (COP22).

Ségolène Royal a rappelé que, même s’ils n’en étaient pas responsables, tous les pays subissaient l’impact du changement climatique, d’où la nécessité d’œuvrer rapidement pour instaurer une tarification du carbone.

Jim Yong Kim a indiqué que la Banque mondiale cherchait des solutions pour aider des pays comme le Pakistan ou le Viet Nam à rendre les énergies solaires moins coûteuses que le charbon, contrairement à aujourd’hui.

Quand un pays commence à déployer un réseau électrique à base de charbon, « c’est un investissement d’un demi-siècle. Une fois lancées, les centrales vont fonctionner pendant 50 ans », a-t-il rappelé.

Pour Mark Carney, il faut impérativement se tourner vers des mécanismes de marché pour traduire l’élan qui a conduit à l’accord de Paris en mesures concrètes. Mais pour cela, le secteur financier doit avoir accès à des informations dont il ne dispose pas aujourd’hui pour maîtriser tous les aspects financiers relatifs au risque carbone.

Il a rappelé que l’Agence internationale de l’énergie avait estimé le coût des infrastructures vertes à déployer dans les 30 prochaines années à pas moins de 50 000 milliards de dollars. Le risque le plus grave serait que les banques, les créanciers et les investisseurs découvrent ces informations trop tard pour pouvoir s’ajuster sereinement.

Mark Carney a par ailleurs ajouté que, sous réserve de conditions favorables, des volumes colossaux de fonds pourraient être réorientés vers les énergies renouvelables : aujourd’hui dans le monde, il y aurait pour près de 100 000 milliards de dollars d’instruments à revenu fixe dont moins de 1 % sont investis dans les énergies renouvelables ou la finance verte.

Catherine McKenna a souligné que le Canada s’est engagé à appliquer une tarification sur le carbone à l’échelle du pays, indiquant que le monde des affaires planchait actuellement sur des solutions durables et innovantes.

Le Groupe de la Banque mondiale a décidé quant à lui, comme l’a rappelé Jim Yong Kim, de porter la part du financement climatique dans son portefeuille de 21 à 28 % d’ici 2020, pour mobiliser jusqu’à 29 milliards de dollars par an en faveur du climat.

Le nouveau Plan d’action sur le changement climatique du Groupe, dévoilé le 7 avril, marque un tournant : il vise à aider les pays en développement à accroître les sources d’énergie renouvelable, réduire les sources d’énergie à forte intensité de carbone, mettre en place des systèmes de transport écologiques et construire des villes durables où il fait bon vivre. Ce plan ajoutera 30 gigawatts d’énergie renouvelable (assez pour alimenter en électricité 150 millions de foyers) à la capacité énergétique mondiale, mettra des systèmes de préalerte à la disposition de 100 millions de personnes et élaborera au profit d’au moins 40 pays d’ici 2020 des plans d’investissement dans une agriculture climato-intelligente.

Jamais la cause de l’action climatique n’a été aussi convaincante : l’année 2015 a atteint des records de chaleur depuis le début des enregistrements et jamais l’hiver arctique n’a été aussi chaud. Les phénomènes extrêmes (tempêtes, inondations, sécheresses), toujours plus fréquents et intenses, touchent des millions d’habitants dans le monde. Le changement climatique menace la sécurité hydrique et alimentaire de notre planète, déstabilise les chaînes d’approvisionnement agricole et fragilise bon nombre de villes côtières.

Selon un rapport récent de la Banque mondiale, Shock Waves: Managing the Impact of Climate Change on Poverty, l’inaction climatique pourrait faire basculer 100 millions de personnes supplémentaires dans la pauvreté d’ici 2030. Il y a urgence.


Auteurs

Donna Barne

Rédactrice pour les sites institutionnels

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