Dans bien des villes des pays à revenu faible ou intermédiaire, les routes sont encombrées de véhicules qui crachent une fumée noire, hors d'âge depuis longtemps ou non équipés de dispositifs de sécurité de base : correction électronique de trajectoire, systèmes d'antiblocage des freins, airbags et ceintures de sécurité fonctionnelles. Outre leur aspect peu engageant, ces véhicules sont une cause importante des accidents de la circulation, de la pollution de l'air et de la surconsommation de carburant. Pourtant, les discussions des pouvoirs publics autour des problèmes de transport sont souvent centrées uniquement sur les infrastructures — construction de routes, de ponts et, avec un peu de chance, développement des transports publics — alors que la qualité des véhicules eux-mêmes est en général ignorée.
Et si l'amélioration de la qualité des véhicules pouvait avoir plus d'impact que nous l'imaginons ? Les véhicules en mauvais état contribuent aux risques de sécurité routière, aux émissions toxiques et à la consommation excessive de carburant. Ils constituent une pièce cruciale, mais souvent négligée, du puzzle des transports. Alors, comment les gouvernements peuvent-ils s'attaquer à ce problème ? Une grande partie de la réponse réside dans de solides systèmes de gestion des informations sur les véhicules motorisés (MVIMS, acronyme de l'anglais Motor Vehicule Information Management Systems).
La qualité des véhicules est un enjeu national
Quand un pays connaît des problèmes de congestion du trafic, de sécurité routière ou de pollution, il peut être tenté de rechercher des solutions d'application locale comme la gestion de la circulation, davantage de contrôles ou la promotion de carburants plus propres. Or, en réalité, ces problèmes découlent souvent de la faiblesse du système de gestion de la qualité des véhicules, une responsabilité qui relève généralement de l'échelon national. En l'absence de contrôle efficace, les véhicules dangereux et polluants continuent de sillonner les routes, ce qui aggrave les problèmes liés aux transports dans leur ensemble.
Publié en 2022 par la Banque mondiale, le rapport Motorization Management for Development (a) souligne que l'amélioration du parc automobile d'un pays n'est pas seulement une question de projets ponctuels, mais qu'elle suppose des politiques nationales, des systèmes de données précis et connectés, ainsi que des dispositifs de contrôle appropriés. C'est là que les systèmes de gestion des informations sur les véhicules motorisés entrent en jeu.
Que sont les MVIMS et pourquoi sont-ils importants ?
Un MVIMS est un système centralisé qui collecte et gère les données relatives aux véhicules immatriculés pour veiller à ce qu'ils respectent les normes de sécurité et environnementales. Il constitue la pierre angulaire des mesures prises par un pays pour réglementer son parc automobile. Ces systèmes garantissent que les véhicules respectent les réglementations environnementales et de sécurité grâce à des contrôles et à un suivi de la conformité. Ils bénéficient aussi au secteur des assurances en fournissant des données fiables sur les véhicules, en réduisant la fraude et en améliorant la couverture. Enfin, ils favorisent le commerce de véhicules plus propres en contrôlant le respect des normes applicables par les véhicules d'occasion importés, tout en facilitant l'application globale de la réglementation.
Cependant, de nombreux pays à revenu faible ou intermédiaire ne disposent pas de systèmes robustes et efficaces, ce qui se traduit par des registres de véhicules obsolètes, inexacts ou fragmentés. Par conséquent, l'application de la législation est défaillante et des véhicules ne répondant pas aux normes restent en circulation.
Plus précisément, de nombreux MVIMS existants se heurtent aux problèmes suivants :
- Mauvaise qualité des données : les enregistrements peuvent être incomplets, obsolètes ou incohérents.
- Manque d'intégration des systèmes : des bases de données distinctes pour l'immatriculation des véhicules, l'assurance et les permis de conduire compliquent la coordination.
- Capacités technologiques limitées : de nombreux systèmes reposent encore sur des processus papier plutôt que sur des outils numériques.
Afin de renforcer la gestion des véhicules à moteur au niveau national, la Banque mondiale a publié un nouveau rapport (a) qui analyse les MVIMS en place dans le monde. Le rapport propose aux pouvoirs publics les recommandations suivantes : a) établir un cadre juridique clair pour la collecte, le partage et le contrôle des données ; b) renforcer la coordination institutionnelle pour s'assurer que les différents services (transport, environnement, application des lois) peuvent accéder aux données et les utiliser efficacement ; c) améliorer le périmètre des données pour suivre les véhicules tout au long de leur cycle de vie, depuis l'importation jusqu'à la mise hors service ; d) moderniser la technologie en passant à un stockage des données dans le cloud et à des enregistrements numériques pour plus d'efficacité et de sécurité.
Diagramme des capacités d'un MVIMS (extrait du rapport)
Systèmes de gestion des informations sur les véhicules motorisés : un cadre d’amélioration continue
Un enjeu important aujourd'hui
Alors que de nombreux pays se tournent vers la mobilité électrique, le besoin de données précises et actualisées sur les véhicules n'a jamais été aussi important. Disposer d'un MVIMS performant sera essentiel pour gérer cette transition, c'est-à-dire pour suivre l'adoption des véhicules électriques, garantir des normes d'entretien appropriées et intégrer la planification des infrastructures de recharge.
En effet, si un pays ne connaît même pas le nombre et l'état des véhicules qui circulent aujourd'hui sur ses routes, comment peut-il poser les bases d’un système de transport plus propre et plus sûr ? Renforcer les MVIMS ne consiste pas seulement à résoudre les problèmes d'aujourd'hui, mais aussi à préparer la mobilité de demain.
Les gouvernements qui investissent aujourd'hui dans de solides systèmes de gestion des véhicules seront mieux à même d'améliorer la sécurité routière, de réduire les émissions et de favoriser un réseau de transport moderne et efficace pour les années à venir.
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