Le Programme Eau et Assainissement (WSP) de la Banque mondiale vient de terminer une importante étude sur la façon de valoriser le potentiel des technologies de l'information et de la communication (TIC) pour 'améliorer les services d'eau et d'assainissement en Afrique. Selon un rapport du GSMA, en 2014, 52% de tous les déploiements d’outils de transfert d'argent via le téléphone mobile à l’échelle mondiale se trouvaient en Afrique subsaharienne et 82% des Africains avaient accès à une couverture GSM. En comparaison, seulement 63% avaient accès à l'eau potable et 32% à l'électricité. Cette adoption rapide de technologies-mobile en Afrique offre une occasion unique pour la région de faire face au manque criard de données et d'informations sur les infrastructures d'eau et d'assainissement existants et leur gestion actuelle - une barrière pour l'extension des services aux pauvres.
En outre, les plus pauvres manquent de plates-formes adéquates pour tenir leurs fournisseurs de services redevables et être entendus par les décideurs. En analysant les points forts et les faiblesses des outils TIC existants dans le secteur de l'eau et de l'assainissement, l'étude vise à aider les praticiens à opérationnaliser l'utilisation des TIC dans leurs projets d'eau et d'assainissement.
Dans cette perspective, une revue documentaire au niveau mondial et des études de cas dans sept pays africains (Kenya, Ouganda, Tanzanie, Sénégal, Bénin, Niger et Libéria) ont permis d’analyser les points forts et les faiblesses des outils TIC existants. Le rapport fournit également des éléments pertinents sur la façon dont les TIC peuvent être utilisées pour accélérer l’accès des Africains à des services durables d'eau et d'assainissement.
Voici quelques-uns des avantages potentiels de l'intégration des TIC dans les projets d'eau et d'assainissement:
- Réduire la durée et les coûts des activités de suivi et d'inventaire des infrastructures. La disponibilité de données fiables et d'informations précises sur la gestion des systèmes constituent un préalable à tout système transparent de gestion ou d’aide à la décision. Les TIC peuvent aider à faciliter le transfert plus efficace des données, de réduire les erreurs manuelles de manipulation des données, et d'augmenter la fréquence des inventaires compte tenu des coûts moins élevés. Par exemple, au Libéria l'utilisation de FLOW, un logiciel ouvert, a permis la cartographie de plus de 10.000 points d'eau en moins de six mois en 2011, ce qui a favorisé la préparation d'un plan national d'investissement dans le secteur AEPAH d’un montant de 400 millions de $ de 2012 à 2017. Une enquête classique sur support papier aurait duré au moins un an, sans aucune garantie sur la qualité des données recueillies.
- Améliorer les gains d'efficience des prestataires de services d'eau. Les TIC peuvent permettre de raccourcir le temps de réponse, de réduire les coûts de déplacement, d'entretien et de maintenance, d’optimiser les opérations (coûts de production, efficacité énergétique, etc.) et d’améliorer la qualité du service. La création du cockpit de supervision de la Sénégalaise des Eaux (SDE) chargée de l'approvisionnement en eau en milieu urbain au Sénégal a contribué à accroître le rendement de réseau de 69% à 80% en 10 ans. Au Bénin, une plate-forme basée sur les TIC (Mwater) a facilité l'accès au financement aux fournisseurs privés des services d’eau en milieu rural. Le système a permis la collecte et la publication de façon transparente des données historiques sur les opérations techniques et financières des gestionnaires ouvrant ainsi la possibilité du financement des investissements par les banques commerciales locales.
- Améliorer les taux de recouvrement des factures des prestataires de services d'eau grâce à des systèmes de paiement basés sur les TIC. Les avantages des TIC les plus souvent mis en relief par les sociétés d’eau sont les systèmes de paiement électronique qui permettent l'amélioration de la collecte des recettes grâce à la facilité et la fiabilité des paiements et la réduction des coûts de facturation et de transaction administrative. La société d’eau de Kiamumbi (KWT) au Kenya a établi un système de paiement M-PESA en Décembre 2010, permettant à 550 ménages de régler leurs factures d’eaux mensuelles via le téléphone mobile. Dans le premier mois de déploiement, 42% des clients sont passés au système de paiement mobile et 59% dès le quatrième mois.
- Assurer de meilleurs services aux pauvres. Les téléphones mobiles sont particulièrement adaptés pour répondre aux besoins des populations les plus pauvres et les plus vulnérables. Ils représentent une option de communication généralisée et relativement peu coûteux pour le transfert rapide de l'information et la facilitation de service tout en éliminant les problèmes fréquents de distance et de temps. Au Kenya, Jisomee Mita est une application qui permet aux consommateurs d'eau d’utiliser un téléphone mobile pour noter eux-mêmes l’index de leurs compteurs d’eau, le renvoyer à l’opérateur par SMS et recevoir des factures d'eau à une fréquence qui convient à leur flux de revenus.
- Renforcer la voix des citoyens et le cadre de gouvernance du secteur. Les TIC peuvent être utilisés pour promouvoir la participation citoyenne et créer un système de transparence et de responsabilité. MajiVoice, une plate-forme TIC de communication entre les citoyens et la société des eaux de Nairobi a été testée avec succès avec l’appui du WSP. Les plaintes enregistrées sont passées de 400 à plus de 4.000 par mois et 94% des plaintes ont été résolues contre 46% auparavant.
[1] Étude sur la Valorisation du Potentiel des TIC dans le Secteur Eau, Assainissement et Hygiène par Mouhamed Fadel Ndaw, Spécialiste Eau et Assainissement
[2] The synergies between mobile, energy and water access: Africa – Groupe Spécial Mobile Association (GSMA 2014)
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