Imaginez Haïti, le pays le plus pauvre de l'hémisphère occidental. Visualisez ses communautés les plus démunies. Maintenant, pensez à l'accès à un besoin des plus élémentaires : l'eau potable.
La situation est critique. Seulement 43 % des Haïtiens vivant en zones rurales ont accès à de l'eau potable, contre 90 % dans le reste de l'Amérique latine et des Caraïbes. Les communautés les plus pauvres sont les plus touchées, avec seulement 28 % ayant accès à de l'eau potable de base, contre 95 % pour les plus riches.
Cette inégalité flagrante résulte de décennies de sous-financement, d'infrastructures inadéquates et d'une absence générale de résilience des services d'eau, d'assainissement et d'hygiène (WASH) face aux catastrophes. Intégrer des mesures de prévention, de préparation et de réponse aux catastrophes dans la planification sectorielle et la gestion des infrastructures est essentiel pour garantir la continuité des services WASH et accroître la capacité du secteur à absorber, s'adapter et se rétablir après des chocs tout en maintenant la prestation des services. Cela comprend l'atténuation des perturbations du système telles que les contraintes financières, les défis socio-économiques, les catastrophes et le changement climatique, ainsi qu'une reprise rapide en cas de perturbations.
Pour mieux comprendre les dangers naturels et les projections climatiques sur le secteur, évaluer les vulnérabilités et proposer des solutions concrètes, une note technique a été produite à partir de trois études spatiales des points d'eau identifiés par la Direction Nationale de l'Eau Potable et de l'Assainissement (DINEPA). Grâce aux données satellitaires, les études ont révélé que près de 94 % des points d'eau en Haïti se trouvent dans des zones exposées aux risques. En particulier, 32 % dans les zones de sécheresse, 34 % dans les zones inondables, et 28 % dans les zones à risque sismique. Lors de catastrophes dans ces zones, les populations dépendant de ces points d'eau font face à des défis tels qu'un accès limité à l'eau potable, une augmentation des risques sanitaires, l'insécurité alimentaire, des perturbations sociales et économiques, et des déplacements. Cela souligne l'urgence des mesures de préparation aux catastrophes, du renforcement de la résilience et des investissements dans des infrastructures durables pour atténuer les impacts futurs des catastrophes sur les populations vulnérables.
Des recommandations ont été développées pour améliorer la résilience du secteur WASH en Haïti. Ces recommandations couvrent des domaines tels que la gouvernance, les infrastructures, la gestion des ressources en eau, la capacité opérationnelle et technique, la coordination avec les principaux acteurs du secteur WASH et la communication avec la Protection Civile. Ces recommandations contribueront à améliorer l'accès pour les populations ciblées et à renforcer la résilience du projet de 80 millions de dollars — le Projet Décentralisé et Durable pour l’Eau et l’Assainissement en Milieu Rural (a), financé par la Banque mondiale, avec un soutien technique et institutionnel du Global Water Security and Sanitation Partnership, et mis en œuvre par la DINEPA.
Un focus sur la résilience
Le projet reconnaît que la simple construction de nouveaux systèmes d'eau ne suffit pas. Ces systèmes doivent être conçus pour résister aux impacts des sécheresses, des inondations et des tremblements de terre. Pour y parvenir, le projet :
- Cartographie des risques : En utilisant des données satellitaires, il identifie les zones les plus vulnérables aux risques naturels, permettant des interventions ciblées.
- Développement de plans de contingence : Le projet soutient l'élaboration de plans de contingence pour les systèmes d'eau ruraux afin de garantir que les communautés puissent continuer à accéder à l'eau même en cas d'urgence.
- Investissement dans des infrastructures durables : Le projet incite les communautés à construire des systèmes d'eau résilients et durables, garantissant un accès à long terme à l'eau potable.
Ce projet commence déjà à faire la différence. Des plans de contingence pour 25 systèmes d'eau ruraux, desservant environ 125 000 personnes, ont été développés. L'objectif est d'en avoir 150 en place au cours des cinq prochaines années, ce qui garantirait l'accès à l'eau potable pour environ 750 000 personnes. Il s'agit d'une étape cruciale pour renforcer la résilience des communautés rurales d'Haïti et protéger l'accès à l'eau potable, même face à des événements météorologiques extrêmes.
« Planifier des contingences est crucial. En intégrant cet outil de planification innovant dans la gouvernance de nos systèmes d'eau ruraux, nous garantissons que les communautés restent résilientes face aux perturbations. Ces plans ne protègent pas seulement l'accès à l'eau en cas d'urgence, mais améliorent également la durabilité à long terme de nos infrastructures », a déclaré l’ingénieur Pierre Bernardin Poisson, directeur du bureau régional de la DINEPA pour le département du Nord.
Face à des disparités alarmantes dans l'accès à l'eau et à des vulnérabilités dues aux dangers naturels, de nombreux défis subsistent. Le chemin vers la résilience est long, mais avec les bons investissements et une approche collaborative, Haïti peut surmonter les tempêtes, s'adapter aux changements et construire un avenir meilleur où chaque goutte d'eau compte.
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