Combien d'enfants aimeriez-vous avoir?

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La préférence pour les familles nombreuses continue d'être un facteur déterminant du taux de fécondité en Afrique sub-saharienne. Les données récentes du DHS expliquent les raisons pour lesquelles les hommes et les femmes préfèrent et choisissent d'avoir de grandes familles. Bien que les facteurs qui influencent les femmes sur cette décision sont complexes et varient d'une société à l'autre, des similitudes existent.

La culture, les croyances religieuses, les relations entre les sexes et les faibles taux de survie des enfants - jouent un rôle important dans les décisions très personnelles d’enfanter et par conséquence sur l’ensemble des niveaux et des tendances de fécondité.  Ces tendances ne dépendent pas uniquement de facteurs du côté de l’offre ou de barrières économiques – c’est-à-dire l’accès aux services du planning familial – le nombre d'enfants reste un choix très personnel pour les femmes.

Plusieurs facteurs déterminent le nombre d'enfants dans une famille: I) Le désir de familles nombreuses – un désir propre à chacun, les désirs de famille, les normes sociales (y compris la sécurité de la vieillesse) ; II) la mortalité infantile courante – le remplacement et la thésaurisation / assurance; et III) L’information – l’information sur la manière d'utiliser le planning familial, les options disponibles, les effets secondaires et les mesures d'atténuation, les services disponibles, les lieux, et les coûts.

La région du Sahel a l'un des plus hauts taux de désir de fécondité en Afrique sub-saharienne. Les données de l'EDS montrent qu'en moyenne, la majorité des femmes désirent avoir plus de cinq enfants; or le nombre d'enfants souhaité au Tchad et au Niger est supérieur à 8. En outre, l'écart entre le souhait de fécondité et la réalité varie considérablement à travers l'Afrique subsaharienne (figure 1a). Dans les pays tels que le Niger, le Tchad, le Mali, le Burkina Faso et la Zambie, la différence est inférieure à 15%, ce qui indique que les obstacles liés à la demande peuvent représenter un plus grand défi que les obstacles liés à l'offre (figure 1b). Au Niger et au Tchad, la différence est d'environ 3%.

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Data source:  Most recent Demographic and Health Survey, 2003-2014
Une analyse qualitative a exploré cette question dans le Sahel et a montré que le rôle des enfants dans la société en tant que futurs founisseurs pour la famille reste un facteur important dans les décisions de reproduction au sein de la famille. Étonnamment, même les personnes urbaines et instruites étaient très fiers d'avoir une famille nombreuse- c’est un indicateur de prestige, de respect et d'honneur qu'ils détiennent dans la société, étant donné que les enfants assurent  la descendance.

Les enfants sont aussi une forme de protection pour les parents vieillissants qui n’ont pas de retraite ou d’économie. L'analyse du Sahel a également démontré que la position des femmes dans la société et les relations inégales entre les sexes au sein d'une union sont des facteurs clés qui influencent l’accès aux services de santé reproductive, y compris la planification familiale.
 
Le désir des hommes pour les familles nombreuses, ainsi que des interprétations culturelles et religieuses qui s’opposent à des familles de taille limitées ont également été cités comme étant des motifs favorisant les familles nombreuses.
 
Par exemple, 21% des femmes au Niger ont signalé qu’un obstacle important à l’accès aux soins reproductifs est de nécessiter l’autorisation du mari pour les obtenir. Les femmes ont cité la crainte de la désapprobation et la stigmatisation si elles vont à l'encontre des normes sociales. De plus, un grand nombre d'enfants augmente la probabilité que quelques-uns survivront à l'âge adulte, assurant ainsi une forme de protection dans les sociétés où la mortalité infantile est élevée.

Outre le desire de fonder une famille nombreuse et les questions de la survie de l’enfant, il y a le problème du savoir. Alors que la connaissance d’une méthode contraceptive moderne est relativement élevée (et même quasi universelle dans certains pays de l’Afrique sub-saharienne), ce savoir est limité dans d’autres régions. La connaissance de la période fertile, de la reproduction et de la sexualité; les bénéfices associés à l’utilisation du planning familial; les multiples options; les effets secondaires possibles associés à chaque méthode et aux mesures d’atténuation; les services disponibles et leurs localisations; et les coûts ont tendances à être limités. Par exemple, au Niger en 2012, alors que 90% des femmes connaissaient une méthode moderne, seulement 40% des femmes se disaient informées des effets secondaires associés aux méthodes. De plus, seulement 35% reportaient être informées des mesures à prendre en cas de manifestation d’effets secondaires et 57% déclaraient connaitre une méthode alternative. Dans un sondage effectué en Gambie, presque 20% des femmes vivant en région rurale déclaraient ne pas savoir où obtenir des contraceptifs.

Ces obstacles du côté de la demande doivent être pris en compte dans l’évaluation des besoins relatifs à la santé reproductive des femmes. Dans bien des cas, ces barrières sont difficiles à aborder parce qu’elles impliquent le domaine de la foi ainsi que des choix très personnels définis par des cultures et des traditions. Ces obstacles liés au dividende démographique représentent un réel défi dans la lutte pour la réduction de la pauvreté ainsi qu’envers les possibilités de croissance économique.

Voici quelques stratégies prometteuses qui ont été mises en place avec succès dans d’autres régions (ex: Asie du Sud, Asie du Sud-Est et le Moyen Orient):
  • de la communication visant les changements sociaux et comportementaux et impliquant divers acteurs concernés afin d’aborder les normes culturelles, sociales, religieuses et traditionnelles;
  • une distribution au niveau communautaire de l'information et des services sur le planning familial afin de surmonter les obstacles liés au genre, à la mobilité et à l’accès à l’information;
  • la formation de professionnels de la santé afin de fournir une meilleure information et de meilleurs services afin de surpasser l’obstacle de la connaissance
  • l'éducation des filles sur le long terme pour l’évolution des préférences et la capacité d'agir sur les  préférences.
​L’implication de leaders traditionnels et religieux dans la réinterprétation de textes religieux sur la santé des enfants et des femmes a été une approche efficace. Ces approches peuvent être davantage adaptées aux réalités contextuelles. Dans certains contextes, des messages de planning familial gagneraient à se concentrer davantage sur les bénéfices d’espacer les naissances afin d’assurer la survie de la mère et de l’enfant; et des discussions abordant le compromis qualité-quantité pourrait faire écho aux hommes en particulier.

La combinaison de plusieurs interventions permettra une transition vers des familles plus petites, la réduction de la pauvreté et une meilleure croissance économique. En effet, les expériences des pays suggèrent qu'une intervention tant sur le côté de l’offre que de la demande sont nécessaires pour surmonter ces obstacles complexes, présents au niveau de la demande.

L’opportunité de répandre le changement en Afrique sub-saharienne est possible avec la mise en œuvre de mesures politiques qui prennent en compte ces leçons.

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Auteurs

Anne Bakilana

Practice Leader for Human Development, Kenya, Rwanda, Somalia and Uganda

Rifat Hasan

Senior Health Specialist

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