Selon les Nations Unies, 60 % de la population mondiale vivra en zone urbaine en 2030 . D’ici là, il y aura un milliard de citadins supplémentaires, et ils se trouveront essentiellement en Asie et en Afrique, deux régions qui sont le théâtre de transformations qui auront une incidence permanente sur leurs trajectoires économiques, environnementales, sociales et politiques.
L’Objectif de développement durable (ODD) n° 11 vise à s’assurer que les villes et autres établissements humains sont sûrs, inclusifs, résilients et durables, en ciblant notamment les problèmes de logement et d’insalubrité, les transports, les processus de planification participative, le patrimoine culturel, la gestion des déchets, la qualité de l'air et la gestion des risques de catastrophe.
Donner un toit au milliard de citadins supplémentaires qui s’annonce
Fournir des logements décents et les services publics adéquats à des citadins de plus en plus nombreux constitue un immense défi. Plus de la moitié de la population subsaharienne vit dans des bidonvilles , une situation qui se caractérise, selon la définition du Programme des Nations Unies pour les établissements humains, par un manque d’accès à une source d’eau de boisson améliorée, à des installations d’assainissement améliorées, à une surface habitable suffisante et à une structure durable ainsi que par l’absence de garantie de maintien dans les lieux.
Les progrès réalisés dans l’amélioration de ces conditions de vie sont mitigés. En République centrafricaine et au Mozambique, le nombre de personnes vivant dans des bidonvilles est à la hausse. Inversement, au Rwanda, la part des citadins vivant dans des bidonvilles a chuté de 96 % en 1990 à 53 % en 2014. C’est également le cas au Mali, qui a enregistré une baisse spectaculaire, de 94 % à 56 %.
La pollution atmosphérique est responsable d'un décès toutes les dix secondes
Dans les régions en cours d’urbanisation rapide, la dégradation de la qualité de l’air pèse de plus en plus sur la santé des populations. L’exposition à la pollution de l’air extérieur (mesurée par la concentration de particules d’un diamètre inférieur à 2,5 microns [PM2,5]) entraîne chaque année 2,9 millions de décès, soit environ un décès toutes les dix secondes. En Asie du Sud, les concentrations de PM2,5 en extérieur sont quatre fois supérieures au seuil recommandé, et elles sont également élevées dans la région Asie de l’Est et Pacifique. Dans ces deux régions, la qualité de l'air se dégrade depuis 1990.
Que mesurons-nous exactement ?
Comme nous l’avons déjà observé (a), l’absence de consensus universel sur la définition exacte de l’adjectif « urbain » et de ce qui constitue une « ville » complique le suivi des progrès relatifs à l’ODD n° 11. En effet, plusieurs cibles de cet ODD font référence à des termes tels que « population urbaine » et « villes de plus de 100 000 habitants ». Mais quelle doit être la taille ou la densité d’un établissement humain pour qu’on le considère comme une ville ? Faut-il qu’il y ait certaines activités économiques dans une zone pour que celle-ci soit considérée comme urbaine ? Dans les faubourgs d’une ville, quelle est la limite exacte entre zone urbaine et zone rurale ? Comme la manière de définir et d’évaluer les zones urbaines est propre à chaque pays, il est assez problématique de comparer les évolutions de l’urbanisation entre différents pays.
Surveiller l’urbanisation et la pollution depuis l’espace
Grâce aux données fournies par les satellites, les chercheurs peuvent désormais appliquer de nouvelles techniques pour mesurer l’urbanisation et développer une base de données standardisée sur les villes. L’Agence aérospatiale allemande (DLR), par exemple, a cartographié la quasi-totalité des établissements humains dans le monde à l’aide de données radar dans le cadre du projet Global Urban Footprint (a). De même, le Centre commun de recherche de la Commission européenne produit une carte des établissements humains dans le monde (a) qui tire parti de l’imagerie par satellite pour suivre l’évolution de la croissance urbaine depuis 1975. Les chercheurs de la Commission européenne, de l’OCDE et de la Banque mondiale utilisent ce genre de données pour appliquer des définitions standardisées de ce que sont les zones urbaines, et ces travaux commencent à transformer notre compréhension de l’urbanisation. Il apparaît ainsi que de nombreux pays d’Amérique latine sont relativement moins urbanisés qu’on ne le pensait et, inversement, certains pays d’Asie du Sud le sont nettement plus. Ces approches standardisées, associées aux nouvelles données satellitaires, sont déjà en train de remettre en cause un certain nombre d’idées concernant la distribution des villes dans le monde.
L’observation par satellite des particules en suspension permet par ailleurs de surveiller les niveaux de pollution tant dans les zones rurales qu’urbaines. Si rien ne remplace la surveillance au sol, surtout dans les zones urbaines densément peuplées, de larges pans de la planète ne disposent toujours pas des infrastructures appropriées. Par conséquent, les technologies de télédétection, comme celles qui sont utilisées dans le cadre de l’étude sur la charge de morbidité dans le monde (a), restent des outils efficaces pour mesurer à grande échelle l’exposition aux polluants atmosphériques.
De nouveaux satellites d'observation de la Terre sont lancés régulièrement, et ils envoient chaque jour des téraoctets de données utiles. Associés à d’autres nouvelles sources de données, ils peuvent nous aider à avoir une vision globale de la nature et de l’ampleur des défis liés à l’urbanisation, et nous permettre de mesurer nos progrès en faveur de l’édification de villes inclusives, sûres, résilientes et durables.
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