Publié sur Opinions

La lutte contre les fragilités revêt une importance capitale pour le développement

????? ?? ????? ?????? ??? ??????? ???????? ???? ?????? ????? أطفال في اليمن ينظرون عبر المناظر الطبيعية التي مزقتها الحرب

Les perspectives demeurent sombres pour les populations des pays en développement.  La pandémie de COVID-19 et les mesures de fermeture et de confinement auxquelles elle a conduit mettent à mal l’efficacité des structures civiles et institutionnelles, et viennent ajouter à la fragilité et à la violence, entraînant une conjonction de crises interdépendantes dans les domaines de la politique étrangère, du développement et de l’économie.

Nos estimations montrent que des centaines de millions de familles subissent les conséquences du recul du développement et d’une crise économique d’une ampleur sans précédent depuis près d’un siècle.  Qu’il s’agisse de la pauvreté, de la croissance, des inégalités, de la nutrition, de l’éducation ou encore de la sécurité, tous les indicateurs se détériorent au lieu de s'améliorer.

Les inégalités se sont aggravées au sein et entre les pays, et ce d'autant plus que les politiques budgétaires et monétaires ont pour effet de favoriser les riches, au détriment des populations et des pays les plus pauvres.  Ceux qui sont au bas de l'échelle des revenus souffrent à la fois des insuffisances des systèmes gouvernementaux nationaux et des faiblesses des institutions mondiales. Ils paient injustement un lourd tribut à des crises mondiales multiples qui leur échappent et dont ils ne sont guère responsables.

« Nous avons également augmenté nos financements en direction des pays en situation de fragilité, pour les porter de 3,9 milliards de dollars au cours de l’exercice 2016 à 15,8 milliards de dollars sur l’exercice 2021. »

La hausse de l’inflation et des taux d’intérêt frappe plus durement les populations les plus pauvres du monde. Dans le système mondial actuel, le capital, la richesse et le surcroît de dépenses publiques restent concentrés dans un groupe très limité d’économies avancées. Ce système a un prix : moins de petites entreprises, une croissance plus faible des revenus médians et des reculs plus importants sur le plan du développement.

La mauvaise allocation des capitaux affaiblit les investissements productifs, la formation des ressources humaines et la logistique, soit autant d'éléments qui sont essentiels pour le dynamisme des chaînes d'approvisionnement,  et donc pour juguler l’inflation et les risques de pénurie. En l’absence d'entrées de capitaux suffisantes, les pays en développement ne sont pas en mesure de répondre comme ils le devraient à la multitude de défis auxquels ils sont confrontés. Ce sous-investissement frappe plus particulièrement l’Afrique, qui souffre d’un accès insuffisant à l’électricité et à l’eau potable, et dont le développement est entravé par les obstacles réglementaires.

C’est dans ce contexte que les conflits et les violences contribuent à aggraver les disparités économiques, avec des répercussions coûteuses au-delà des frontières. Selon les estimations du Groupe de la Banque mondiale, 23 pays dans le monde, avec une population totale de 850 millions d’habitants, sont actuellement confrontés à des conflits de forte ou moyenne intensité, tandis que le nombre de personnes en situation d’insécurité alimentaire a été multiplié par deux pour atteindre 270 millions. Ces tendances vont toutes dans la mauvaise direction : le nombre de pays en conflit a plus que doublé au cours de la dernière décennie, entraînant des flux massifs de réfugiés.

Alors que leur croissance économique est en berne et leur population très jeune, les États fragiles et touchés par un conflit doivent devenir une priorité mondiale. Le Groupe de la Banque mondiale œuvre depuis toujours dans les États fragiles, et nous avons mobilisé des ressources considérables pour aider ces pays à tracer la voie à suivre.  Au cours des quatre dernières années, notre présence sur ces terrains a quasiment doublé, et nous comptons actuellement plus 1 200 collaborateurs dans des environnements fragiles. Nous avons également augmenté nos financements en direction des pays en situation de fragilité, pour les porter de 3,9 milliards de dollars au cours de l’exercice 2016 à 15,8 milliards de dollars sur l’exercice 2021. Mais pour obtenir des résultats tangibles sur le front du développement, l'action unilatérale ne suffit pas. Exposés au risque d’une réaction mondiale trop lente, les pays en proie à la fragilité, aux conflits et à la violence subissent de plein fouet l’impact de l’inflation, de la hausse des taux d’intérêt et du fardeau accablant de la dette, qui grèvent lourdement leurs finances.

Les solutions à ces difficultés passent nécessairement par des efforts internationaux coordonnés. Il est indispensable de mettre fin aux livraisons d’armements dans les États fragiles et touchés par un conflit et de réduire le danger des armes à feu et des mines terrestres héritées de précédentes flambées de violence. La réduction des tensions nécessite également une réglementation plus stricte des entreprises de sécurité internationales.

Les organisations multilatérales peuvent apporter une contribution encore plus importante à la sécurité lorsqu’elles disposent d’une forte présence sur le terrain.  Sachant que les capacités des gouvernements des États fragiles et touchés par un conflit sont généralement faibles, il est évident que la poursuite des activités sur place est importante pour favoriser une réalisation efficace des programmes. Dans ces environnements fragiles, les innovations technologiques, et notamment les paiements numériques, s’avéreront également essentielles pour les ménages à faible revenu et les petites entreprises.

En ces temps bouleversés, une action concertée est plus que jamais nécessaire. Les accords internationaux devraient spécifiquement s’attacher à promouvoir le développement humain et économique dans les États fragiles et touchés par un conflit, en leur donnant accès à des médicaments à un coût abordable et en endiguant le flot des armes de guerre. La réponse macroéconomique à l’inflation doit éviter d’entraîner le monde en développement dans une nouvelle phase de turbulences économiques. Et, enfin, il faudrait adopter des mécanismes viables pour restructurer la dette des pays les plus pauvres et accroître la transparence des conditions d’emprunt.

Les pays en développement doivent pouvoir trouver une voie qui leur permettra durablement de faire reculer la pauvreté et de promouvoir une prospérité partagée pour sortir du cercle vicieux des conflits et des violences. Le Groupe de la Banque mondiale continuera d'œuvrer, en étroite collaboration avec les gouvernements, la société civile et le secteur privé, pour obtenir des résultats sur le terrain et contribuer ainsi à réduire la pauvreté et accroître la prospérité au profit du plus grand nombre.


Auteurs

David Malpass

Ancien président du Groupe de la Banque mondiale

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