Le Programme de Coopération pour les eaux internationales en Afrique (CIWA) trouve son origine dans le bassin du Nil. La Journée du Nil, organisée le 22 février, a pour but de mettre à l’honneur le plus long fleuve du monde qui assure la subsistance de plus de 200 millions de personnes. Nous vous invitons à cette occasion à découvrir les témoignages de Donald Kasongi (ancien secrétaire général du NBD — Discours du bassin du Nil) et d’Isaak Alukwe (coordinateur régional de la NELSAP-CU — Programme d’action subsidiaire des pays des lacs équatoriaux du Nil) dans ce nouveau blog de la série « Point de vue du terrain ».
L’Afrique de l’Est est confrontée à une multitude de difficultés, notamment l’insécurité alimentaire et hydrique, la montée de la violence et des conflits, sans oublier les effets du changement climatique. Le programme de Coopération pour les eaux internationales en Afrique (CIWA), est le fruit des progrès obtenus par le Fonds fiduciaire du bassin du Nil en matière de gestion et de mise en valeur des ressources en eau dans le bassin du Nil. Il s’efforce aujourd’hui de renforcer la résilience de la région face à l’aggravation du changement climatique et de l’insécurité hydrique, en associant la société civile à la prise de décisions relatives aux ressources en eau, en encourageant le dialogue entre les pays riverains et en favorisant la diplomatie de l’eau.
L’approche révolutionnaire adoptée par le bassin du Nil pour promouvoir la parité femmes-hommes et l’inclusion sociale (GESI)
Les femmes doivent collaborer « pour décider de la quantité d’eau nécessaire, du lieu où aller chercher l’eau et de la façon dont elles doivent s’organiser pour tirer l’eau d’une rivière », déclare Donald Kasongi, ancien secrétaire général et actuel président de la section tanzanienne du Discours du bassin du Nil (NBD), qui s’est employé avec CIWA à transformer les rapports entre les hommes et les femmes dans le cadre de la gestion des ressources en eau du bassin.
Le cadre GESI de CIWA repose sur le principe que la plupart des approches visant à lutter contre les inégalités entre les sexes, comme celle qui consiste à compter le nombre de femmes participant aux réunions de présentation des résultats, ne permettent pas de progresser durablement vers l’égalité. L’approche GESI adoptée par CIWA vise à faire évoluer les mentalités et à adopter une démarche globale en tenant compte des normes et rôles attribués aux hommes et aux femmes, du pouvoir et des processus de prise de décisions, de l’accès aux ressources et de leur contrôle, ainsi que des obstacles institutionnels à la pleine participation des femmes.
C’est ce que fait M. Kasongi dans le bassin du Nil.
Même s’il travaille sur la problématique du genre depuis 15 ans, M. Kasongi dit qu’il se surprend à « chercher à mieux comprendre les normes sociales. Il ne s’agit pas de savoir combien de femmes sont présentes dans la salle. Il s’agit de leur donner les moyens de se prendre en charge. »
M. Kasongi insiste sur le fait que la poursuite d’une approche universelle de la GESI ne donnera pas de résultats positifs dans une région aussi diversifiée. Certains pays à l’est et au centre du bassin du Nil sont plus réceptifs à la remise en question des normes et des valeurs patriarcales. En revanche, il convient d’adopter une approche différente dans les pays où les femmes sont considérées comme la propriété des chefs de famille qui sont de sexe masculin.
Des mesures en faveur de la sécurité et de la résilience des ressources en eau dans le bassin du Nil
Insécurité hydrique, alimentaire et énergétique. Rapidité de la croissance démographique et de l’urbanisation. Conflits et tensions politiques. Ces tensions, toutes exacerbées par le changement climatique, existent dans de nombreuses régions du monde en développement, mais nulle part au même degré que dans le bassin du Nil.
Demandez à Isaac Alukwe, coordinateur régional de la NELSAP-CU, qui travaille en étroite collaboration avec l’équipe du projet NCCR. « La plupart des projections des modèles climatiques montrent que les températures de surface vont augmenter dans la région des lacs équatoriaux du Nil et que cela va accroître la demande en eau », explique-t-il. « Les pénuries d’eau seront, dans les décennies à venir, un obstacle majeur à la sécurité alimentaire et énergétique et à la réalisation des plans de développement des pays. »
Toujours selon M. Alukwe, « des écosystèmes, des habitats et des éléments de la biodiversité essentiels à l’échelle de la planète seront menacés, voire disparaîtront si les pays n’interviennent pas à temps ». Les pays doivent collaborer pour sécuriser les ressources en eau et protéger l’environnement, mais, ajoute-t-il « la politique, les tensions et la méfiance entre les États du bassin du Nil », sans parler des conflits armés en Éthiopie et au Soudan, entravent fortement la coopération.
C’est pourquoi le projet de Coopération pour la résilience climatique dans le bassin du Nil (NCCR), lancé en 2021, est si important pour la sécurité hydrique de la région.
« Il promeut et renforce la confiance et l’interaction entre les pays grâce au renforcement conjoint des capacités », explique M. Alukwe.
Le projet soutient la formation au renforcement des capacités régionales nécessaires pour consolider les compétences et améliorer la collaboration et encourage le dialogue de sorte que, par exemple, lorsqu’un pays en amont subit de fortes précipitations, il avertit le pays en aval des risques d’inondation. M. Alukwe évoque le succès des rapprochements facilités par CIWA (et son prédécesseur, le Fonds fiduciaire du bassin du Nil) entre le Rwanda, la Tanzanie et le Burundi, qui ont permis de renforcer la coopération et de surmonter les tensions pour mener à bien le projet hydroélectrique régional des chutes de Rusumo. Le projet NCORE mené antérieurement par CIWA, a contribué à la mise en œuvre de l’investissement, qui est en voie d’achèvement.
Malgré les difficultés auxquelles est confrontée la région, M. Alukwe est optimiste quant aux opportunités qui découleront des efforts déployés par le NCCR pour promouvoir le dialogue et la coopération.
« Les États du bassin du Nil ont la possibilité de coopérer pour parvenir à des résultats de développement favorables pour tous dans les domaines de la gestion de l’environnement, des bassins versants, des eaux souterraines, des zones humides, des barrages et des problèmes de sécurité des barrages, de la prévision et de l’alerte précoce en cas d’inondations et de sécheresse, ainsi que de l’adaptation au changement climatique et de l’atténuation de ses effets », explique M. Alukwe. « Il existe de nombreuses opportunités de développement qui, si elles sont bien exploitées, produiront des résultats bénéfiques pour tous au niveau transfrontalier. »
Le projet NCCR, qui devrait déboucher sur des investissements dans les prochaines années, représente « un guichet de financement très important pour promouvoir la collaboration ; il permettra en outre d’améliorer les capacités de préparation et de résilience des pays face aux chocs du changement climatique ».
Pour M. Alukwe, ce qui compte plus que tout, c’est que les efforts déployés par CIWA pour encourager la coopération transfrontalière « contribueront à la stabilité, à la paix et à la prospérité dans tous les pays riverains ».
Les représentants des États partenaires de l’Initiative du Bassin du Nil et des partenaires de développement se rencontreront au lendemain de la Journée du Nil du 22 février, dans le cadre de la rencontre intitulée « Nile Basin Initiative Strategic Dialogue » (Dialogue stratégique de l’Initiative du bassin du Nil) organisée chaque année afin de discuter de la coopération dans le bassin et de partager les informations et les enseignements tirés des activités institutionnelles et des programmes. Ce dialogue vise, depuis sa mise en place en 2006, à renforcer la coopération dans le bassin du Nil en examinant les solutions envisageables pour assurer la pérennité des institutions. Rendez-vous prochainement pour plus d’informations sur cet événement.
POUR EN SAVOIR PLUS
Blogs:
Protéger le lac Victoria pour un avenir vert, résilient et inclusif
La prochaine génération de professionnels de l'eau œuvre en faveur d'une nouvelle ère de coopération
Vidéos et podcasts:
Témoignages des étudiants du programme ENTRO, promotion NCCR 202
Ethiopia Bisrat : portrait d’ingénieure en ressources en eau
Nouvelle génération de décideurs et de spécialistes en eau : le programme ENTRO
Across the Pond Podcast: Une conversation avec Anders Jagerskog sur NCCR (en anglais)
Publications:
Rapport anniversaire de CIWA : CIWA à 10
The Nile Story: 15 Years of Nile Cooperation (En anglais)
Gender and Social Inclusion Framework
Climate Resilience in Africa: The Role of Cooperation Around Transboundary Waters
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