Améliorer la sécurité hydrique et alimentaire : L’Angola, future puissance agricole de l'Afrique ?

Angola Farm Angola Farm

Lorsque l'on pense à l'Angola, le pétrole est généralement la première chose qui vient à l'esprit. Le mois dernier, le pays a même supplanté le Nigéria au rang de premier producteur africain d’or noir. Mais l'Angola pourrait bientôt être aussi connu comme une puissance agricole sur le continent africain.

L'Angola possède une abondance de terres cultivables et jouit d’une grande diversité de conditions climatiques propice à la production de cultures variées. Le pays était un important producteur et exportateur de produits agricoles avant que n'éclate la guerre civile (1975-2002). Le conflit a entraîné l'effondrement de la production agricole commerciale, et, dès les années 1990, les exportations de café, coton et bananes étaient quasiment réduites à zéro. Le potentiel agricole de l'Angola est resté inexploité depuis lors : seuls 10 % des 35 millions d'hectares de terres arables du pays sont actuellement cultivés.

Ces dernières années, cependant, la part de l’agriculture dans l’économie angolaise (a) a connu une croissance rapide (4,9 % par an), passant de 5,8 % à 10 % du PIB au cours de la période 2011-2017. De même, l'irrigation ne joue actuellement qu’un rôle modeste en Angola, mais pourrait considérablement contribuer à favoriser l'adaptation au changement climatique en renforçant la résilience du secteur agricole face aux risques hydriques.

Beans grown in the Cuanza Norte Province. Photo: Izabela Leao/The World Bank
Haricots cultivés dans la province de Cuanza Norte. Photo : Izabela Leao/Banque mondiale.

La vulnérabilité de l'Angola aux dérèglements du climat et aux chocs climatiques s'est fortement accentuée et la population en ressent déjà les effets, ce qui rend d'autant plus importants les efforts de redynamisation et d'adaptation du secteur agricole. Le pays connaît actuellement la sécheresse la plus grave de ces 40 dernières années, avec des répercussions directes sur la sécurité alimentaire de 1,58 million de personnes dans les provinces méridionales. Selon un rapport de la Banque mondiale publié en 2022 et consacré aux questions de sécurité hydrique et de résilience dans le sud de l’Angola (a), les répercussions économiques de la sécheresse, tous secteurs confondus, se chiffrent à plus de 749 millions de dollars, les secteurs de l'agriculture, de l'élevage et de la pêche étant de loin les plus touchés. Comme dans d'autres régions du monde, la guerre entre la Russie et l'Ukraine a par ailleurs entraîné une forte hausse des prix des denrées alimentaires (en particulier le blé), qui a des effets dévastateurs sur les populations les plus pauvres.

La Banque mondiale va en outre publier prochainement un rapport sur les enjeux du climat et du développement (CCDR) en Angola. Ce travail de diagnostic aidera le pays à se doter d’un programme d'investissement et de réforme qui lui permettra d’atteindre ses objectifs de développement dans le contexte du changement climatique en suivant ses propres voies d’adaptation et de décarbonation de l'énergie. Selon l’étude approfondie réalisée sur l'agriculture dans le cadre du CCDR, « les prévisions de changement climatique montrent que les rendements des principales cultures diminueront de l’ordre de 4 à 30 % d'ici les années 2050, en raison principalement du raccourcissement et de la concentration accrue de la saison des pluies, de températures plus élevées, de sécheresses plus nombreuses et de pénuries d'eau. Le nombre de têtes de bétail touchées par des conditions climatiques extrêmes atteindra jusqu'à 70 % du cheptel total, contre 40 % auparavant ».

Transformer le secteur agricole

Soucieux de diversifier l'économie et de faire face au changement climatique, le gouvernement angolais s'attache désormais à redynamiser l’économie rurale et les vastes ressources agricoles du pays.

Le projet de développement de l’agriculture commerciale (PDAC) (a), cofinancé à hauteur de 230 millions de dollars par la Banque mondiale et l'Agence française de développement, vise à accroître la productivité agricole et l'accès aux marchés d'un plus grand nombre d'exploitations. Jusqu'à présent, les interventions innovantes du PDAC pour promouvoir et soutenir le développement du secteur agro-industriel ont conduit à l'approbation de 25 plans d'affaires pour un total de 7,7 millions de dollars d'investissements, dont 2,9 millions de dollars de dons de contrepartie, et à une émission sans précédent de 16 garanties partielles de crédit qui représentent plus d'un million de dollars d'investissements locaux.

Le 16 juin 2022, la Banque mondiale a également approuvé le projet de transformation de la petite agriculture (PROTAF) (a), d'un montant de 300 millions de dollars, qui entrera en vigueur le 15 décembre prochain et viendra accompagner le passage d'une agriculture de subsistance vulnérable à une agriculture climato-résiliente. Le projet PROTAF aidera les agriculteurs à accroître leur production pour qu’ils puissent vendre leurs excédents sur les marchés locaux, élargira l'accès à la vulgarisation agricole grâce à l'institutionnalisation des champs-écoles, et aidera les petits exploitants à pratiquer une agriculture intelligente sur le plan climatique et nutritionnel. Ensemble, ces efforts permettront d'accroître la résilience, la sécurité alimentaire et la nutrition, tout en réduisant la dépendance aux importations alimentaires et l'empreinte écologique du secteur agricole. L’élargissement de l'accès aux technologies de production améliorées, aux intrants et aux services de vulgarisation, dans le cadre d’un dialogue public-privé, aura également des effets positifs sur le climat.

En outre, le projet pour la résilience climatique et la sécurité hydrique en Angola (RECLIMA) (a), financé par la Banque mondiale à hauteur de 300 millions de dollars et approuvé en mars 2022, aidera les autorités angolaises à améliorer l'approvisionnement en eau et à renforcer la gestion de cette ressource pour une plus grande résilience climatique.

Pour devenir une puissance agricole sur le continent africain, l’Angola devra transformer son agriculture afin de répondre aux besoins de sa population (en particulier les agriculteurs et les éleveurs vulnérables), de son économie et de son environnement. Pour y parvenir, le gouvernement angolais redouble d’efforts et collabore avec ses partenaires de développement, dont le Groupe de la Banque mondiale, pour préparer et mettre en œuvre des projets porteurs de transformation.

 


Auteurs

Izabela Leao

Senior Rural Development Specialist, Agriculture and Food Practice

Shobha Shetty

Chef de service au sein du Pôle d'expertise en agriculture de la Banque mondiale

Prenez part au débat

Le contenu de ce champ est confidentiel et ne sera pas visible sur le site
Nombre de caractères restants: 1000