Publié sur Voix Arabes

Moyen-Orient et Afrique du Nord : prioriser l’emploi pendant la pandémie de Covid-19

???????? ??????? ??? ??????? ?? ???? ?????? ??? ??????? ?? ?????? ???????? ?????? ?? ???? ??? ?????? ??????? ??? ?????? ?????????? ??????? ??? ????? ????? ???????. ويُؤثِّر الفيروس على الوظائف من خلال تأثيره على المعروض من الأيدي العاملة، لاسيما من خلال صحة العمال وقدرتهم على الحركة والانتقال، وتأثيره على أنشطة منشآت الأعمال.

Dans le monde entier, le travail et la production sont à l’arrêt. Une situation inédite, conséquence de l’épidémie de coronavirus (Covid-19) et des mesures prises pour l’enrayer. Alors que l’impact sanitaire demeure incertain, la relance à venir peut être l’occasion, pour les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA), de réorganiser leur système économique, soutenir un plus grand nombre d’actifs et d’entreprises et faire décoller leur économie numérique.

Les conséquences de la pandémie sur l’emploi se manifestent par son incidence sur la santé et le confinement des travailleurs, et donc sur l’offre de main-d’œuvre, ainsi que sur l’activité des entreprises (a). Le virus fait reculer la demande de biens et de services, réduit l’offre de moyens de production, resserre les liquidités et exacerbe les incertitudes. Dans la région MENA, cette conjoncture peut être particulièrement délicate pour les raisons suivantes :

  • La prédominance de l’État dans l’économie et une concurrence bridée ont affaibli le secteur privé. L’économie informelle est massive en termes de production (entre 16 et 35 % [a] du PIB) et d’emploi (entre 50 à 74 %). En outre, de nombreux habitants de la région travaillent dans les services, un secteur fortement touché par l’épidémie.
  • L’économie numérique demeure balbutiante dans la région MENA : les entreprises et les acteurs du secteur se heurtent à des obstacles pour utiliser la technologie à des fins productives.
  • La région est particulièrement tributaire des importations, qui représentent 39 % du PIB, soit un chiffre supérieur à toutes les autres régions en développement. Par ailleurs, la part de l’alimentation dans les marchandises importées est également la plus élevée (12 %). Or, les chocs subis par les chaînes de valeur mondiales peuvent avoir de graves répercussions sur la consommation et la sécurité alimentaire.
  • L’effondrement des cours du pétrole fragilise les pays exportateurs de la région MENA, diminuant la valeur de leurs exportations et leur marge de manœuvre budgétaire.

Pour toutes ces raisons, il est encore plus urgent aujourd’hui d’aider les travailleurs et les entreprises, et de stimuler l’économie numérique.

Amortir le ralentissement économique

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Aider les travailleurs

Les États ont misé sur un élargissement de l’aide sociale pour atténuer le choc. La Jordanie et la Tunisie, par exemple, étendent les transferts monétaires à de nouveaux ménages. Ces mesures (a) sont indispensables, mais elles mettent en lumière le besoin de réformes.

Les filets sociaux sont limités dans la région, où ils représentent environ 1 % du PIB (contre 1,5 % en Amérique latine-Caraïbes et 2,2 % en Europe-Asie centrale), malgré des taux de pauvreté et de vulnérabilité élevés. Il sera essentiel d’élargir ces dispositifs et de procéder à un meilleur ciblage à terme.

Les régimes d’allocations de chômage ne sont pas opérants, en raison, notamment, de la part élevée des emplois informels qui restreint d’autant leur source de financement. Dans ces conditions, il est difficile pour les pouvoirs publics d’identifier les travailleurs informels et de leur porter secours. Certains pays ont innové, comme le Maroc (a), qui étend son aide aux bénéficiaires du RAMED (le régime d’assistance médicale). Les pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) semblent être mieux armés et peuvent, à l’instar du Bahreïn (a), mobiliser des fonds de réserve pour soutenir les salaires. L’Arabie saoudite (a) pourrait également élargir son dispositif Hafiz, une assurance chômage (non contributive) qui fait figure d’exception dans la région.

Les États pourraient également soutenir les travailleurs en élargissant leurs mesures de soutien des salaires, tout en veillant à préserver un secteur privé formel déjà peu développé. Certains programmes, comme ceux de l’Algérie et de la Tunisie, pourraient être amplifiés.

À l’instar de la Jordanie et du Maroc (a), les pouvoirs publics pourraient également choisir l’option d’exonération des cotisations sociales, a priori moins coûteuse.

Cependant, ces systèmes pâtissent de problèmes de capacité. Des réformes à court terme pourraient jeter les bases nécessaires à leur amélioration et au renforcement de leur efficacité à long terme.

Accompagner les entreprises et soutenir leur activité

Seuls les pays du CCG semblent avoir commencé à soutenir les entreprises, probablement en raison de leur plus grande marge de manœuvre budgétaire. Le Bahreïn, Oman, le Qatar et les Émirats arabes unis (a) se mobilisent pour préserver leur secteur privé, en repoussant des échéances de prêts pour les petites et moyennes entreprises (PME) ou en accordant de plus larges exemptions pour le paiement des loyers et des charges.

Il est indispensable cependant que d’autres pays en fassent autant, en raison de la part importante (a) des microentreprises et des PME dans le secteur privé et de la proportion de travailleurs qu’elles emploient.

Le moment peut être opportun pour s’attaquer aux difficultés de fond auxquelles le secteur privé se heurte, à savoir 1) l’absence de contestabilité des marchés et la nécessité de garantir une concurrence loyale ; 2) l’accès réduit aux capitaux, souvent dirigés vers les grandes entreprises (a), et la nécessité de développer le secteur financier, avec, entre autres, l’intégration de solutions de paiement numériques ou issues de la fintech ; et 3) la capacité technologique restreinte des entreprises et la nécessité d’une transformation numérique, qui pourrait aussi permettre aux entreprises, à l’heure de la pandémie, de s’adapter plus rapidement aux exigences de distanciation sociale.

Investir dans la transformation numérique

La crise du coronavirus va accélérer l’adoption des nouvelles technologies.

La région peut accroître sa capacité de riposte en s'appuyant sur les outils numériques. Alors que de nombreux pays envisagent de verser des aides financières directes aux ménages et aux petites entreprises, la présence d’un écosystème de paiements numériques bien rôdé entre services de l’État et particuliers pourra améliorer l’efficacité des transferts et permettre de toucher plus de bénéficiaires.

Par ailleurs, grâce aux technologies digitales, le télétravail peut se généraliser et les entreprises accroître leur résilience opérationnelle. Sans oublier l’accès à la santé, où le numérique joue également un rôle important. 

Au-delà de l’épidémie actuelle, si la région MENA investissait dans le numérique, elle pourrait transformer son économie et créer des emplois. À la faveur de la réussite de Careem, une application mobile de mise en relation entre conducteurs et passagers, et du site d’e-commerce Souq, deux fleurons du numérique déjà rachetés par des géants internationaux, le secteur technologique de la région MENA a suscité l’intérêt d’investisseurs du monde entier.

Cependant, il reste beaucoup à faire pour saisir ces opportunités et mettre en place l’infrastructure (a) numérique nécessaire.

Les internautes de la région MENA sont parmi les plus mal desservis au monde : pour 100 habitants, on compte moins de 10 abonnements au haut débit, contre 120 abonnements à la téléphonie mobile. La bande passante est bridée, et si de nombreux citoyens sont actifs sur les médias sociaux, l’internet sert rarement de support pour la création d’entreprises. La finance numérique demeure quasi inexistante, tout comme les paiements numériques entre administration et particuliers.

La mise en place de nouveaux dispositifs et leur incidence sur les finances publiques dépendront bien sûr des priorités de chaque pays et de la manœuvre budgétaire dont il dispose. Ces initiatives lancées à court terme serviront d’autant mieux la population, le secteur privé et l’économie de la région qu’elles s’inscrivent dans la poursuite d’objectifs de moyen et long terme.

 

 


Auteurs

Dalal Moosa

Economist with the Social Protection and Jobs Global Practice 

Federica Saliola

Manager, Jobs Group, Social Protection and Jobs Global Practice

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