Publié sur Nasikiliza

République démocratique du Congo : une nouvelle ère pour l’administration publique avec l’annuaire numérique des agents de l’État

Cette page en:
République démocratique du Congo : une nouvelle ère pour l’administration publique avec l’annuaire numérique des agents de l’État Au cours d’une cérémonie tenue à Kinshasa en 2025, la Première ministre de la République démocratique du Congo (RDC), Judith Suminwa, reçoit le tout premier annuaire des agents publics des mains du vice-Premier ministre, chargé de la Fonction publique, Jean-Pierre Lihau. Photo : Eduardo Estrada / Banque mondiale

Le nombre exact d’agents publics en République démocratique du Congo (RDC) reste inconnu, et il n’existe aucune base de données consolidée couvrant l’ensemble des ministères. Peut-on s’imaginer gérer un pays sans connaître l’effectif réel des fonctionnaires en activité ?

Nous sommes ravis de partager les progrès réalisés par la RDC pour relever ce défi, avec l’assistance technique apportée par notre équipe dans le cadre du projet d’amélioration du recouvrement des recettes et de la gestion des dépenses (ENCORE), financé par la Banque mondiale.

Avant de rentrer dans les détails, il convient de rappeler l’importance de cette initiative. Plus vaste pays d’Afrique subsaharienne, la RDC a près de 100 millions d’habitants et compte le troisième plus grand nombre de personnes pauvres au monde. Alors que la Banque mondiale s’emploie à réduire la pauvreté dans le monde, la réalisation de cet objectif dépend donc en grande partie de la diminution de la pauvreté en RDC. Cependant, une longue succession de conflits, de troubles politiques et de régimes autoritaires a contribué à affaiblir les institutions et engendré des problèmes de gouvernance profonds, qui ont entravé le développement. Cette situation se manifeste notamment par les faiblesses et les coûts de l’appareil administratif.

Au début de l’année 2025, la RDC a lancé le premier annuaire alphabétique et numérique des agents publics travaillant dans l’administration centrale et dans la province de Kinshasa. La cérémonie a été présidée par la Première ministre, Judith Suminwa, et le vice-Premier ministre chargé de la Fonction publique, Jean-Pierre Lihau. À cette occasion, les autorités ont salué le travail des employés congolais qui, traversant les forêts denses à moto et les larges fleuves en pirogue, n’ont pas ménagé leurs efforts pour remettre, même dans les zones les plus reculées du pays, une carte de service biométrique flambant neuve à chaque agent public.

L’objectif de la réforme, soutenue par la Banque mondiale et mise en œuvre par le ministère de la Fonction publique et le Comité d’orientation de la réforme des finances publiques (COREF), est d’améliorer la gestion des effectifs et de la masse salariale de l’État. Il s’agit d’une véritable gageure, puisque plus de 40 % des dépenses du pays sont consacrées aux salaires. La réforme vise également à mettre fin à un problème qui mine depuis longtemps l’administration publique de la RDC : celui des travailleurs « fantômes », ces employés figurant sur le fichier de paie sans pour autant travailler pour l’État, soit parce qu’il s’agit d’agents fictifs soit parce qu’ils ne sont plus en poste.

Le processus de réforme a commencé par la création d’un fichier de référence de l’administration publique (FRAP) consolidant des données sur les employés de divers organismes d’État. Le ministère a traité et validé ces données, et délivré des cartes biométriques à plus de 118 000 agents publics dans les 26 provinces du pays. Le processus se poursuivra avec la mise à jour annuelle de l’annuaire et le renforcement de la numérisation, notamment par l’introduction du système intégré de gestion des ressources humaines et de la paie (SIGRH-Paie), en coordination avec le ministère du Budget. Ces efforts devraient générer des économies pour l’État, qui pourront servir à financer d’autres réformes et programmes de développement.

Le projet ENCORE a été conçu à la lumière de l'expérience des projets de gouvernance menés en RDC ces deux dernières décennies. L’un des enseignements tirés de la mise en œuvre de ces opérations est que le succès n’est pas linéaire. D’où l’impérieuse nécessité de mettre en place des mesures incitatives pour maintenir la dynamique de réformes complexes, à l’instar du processus d’assainissement et de numérisation de la base de données des agents publics. C’est la raison pour laquelle notre équipe a inclus — pour la première fois dans un projet soutenu par la Banque en RDC — des conditions de financement basées sur les résultats, permettant ainsi aux pouvoirs publics de recevoir des fonds sur la base de résultats concrets.

Malgré l’ampleur des obstacles inhérents à un contexte fragile, et notamment la récente aggravation de la situation sécuritaire à l’est du pays, la RDC reste déterminée à moderniser son secteur public. Le pays peut d’ores et déjà se prévaloir d’une avancée significative. Selon le vice-Premier ministre, Jean-Pierre Lihau, réussir un tel pari « est un moment historique rendu possible grâce à l’étroite collaboration entre le Gouvernement et la Banque mondiale ».

Pour la suite, les autorités prévoient de s’atteler au recensement d’un plus grand nombre de catégories de fonctionnaires, tels que les enseignants, les agents de santé, les policiers et les militaires, les juges et les magistrats, actuellement gérées dans des fichiers distincts. La tâche est difficile, mais réalisable, car les résultats déjà obtenus ont permis de créer un cercle vertueux et donné aux autorités l’élan nécessaire pour maintenir le cap sur cette trajectoire ambitieuse. La Banque mondiale et notre équipe en particulier restent engagées à accompagner et soutenir ces actions. 


Prenez part au débat

Le contenu de ce champ est confidentiel et ne sera pas visible sur le site
Nombre de caractères restants: 1000