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Trois considérations sur le genre et les inégalités hommes-femmes dans la gestion du risque de catastrophe

Femmes bénéficiaires d'un programme de développement humain dans le village de Soavina à Madagascar. Photo: © Sarah Farhat / Banque mondiale Femmes bénéficiaires d'un programme de développement humain dans le village de Soavina à Madagascar. Photo: © Sarah Farhat / Banque mondiale

Le genre et les inégalités entre hommes et femmes sont un enjeu fondamental. Le Groupe de la Banque mondiale repousse plus loin ses exigences en matière d’égalité des sexes (a), en mettant l’accent sur les résultats obtenus lors de ses interventions dans les pays clients ainsi que sur leur suivi. Comment cela se traduit-il concrètement dans notre travail sur la gestion des risques de catastrophes ? 

Pour célébrer la Journée internationale des femmes, nous nous sommes entretenues avec Claudia Soto et Jana El-Horr, qui dirigent des projets de la Banque mondiale, la première en Haïti et la seconde à Madagascar. Nous souhaitions mieux comprendre comment et pourquoi, au stade de la conception d’un projet, elles tenaient compte du genre afin de renforcer la résilience aux catastrophes naturelles. Cette année, ce sujet nous a semblé particulièrement judicieux : nous nous heurtons en effet à une crise sanitaire qui frappe de manière disproportionnée les femmes et les filles (a) du monde entier. 

Préparation aux catastrophes (a) en Haïti ou soutien à des moyens de subsistance résilients (a) dans le sud de Madagascar, les projets que supervisent Claudia et Jana sont entrepris dans des contextes difficiles, en situation de fragilité et de conflit, et par ailleurs très vulnérables aux risques naturels et aux chocs climatiques. 

Voici ce que nous avons appris. 

1. La question des femmes ne se résume pas aux femmes. Parce qu’elles sont intégrées à un tissu social, il faut travailler avec toute la communauté pour répondre aux priorités qui sont les leurs.  

Le projet à Madagascar en témoigne largement. La fréquence des catastrophes et l’extrême pauvreté dans le sud de Madagascar créent des crises humanitaires cycliques. Les femmes sont identifiées comme particulièrement vulnérables, et les facteurs de vulnérabilité ne surgissent pas isolément. Les évaluations réalisées dans le cadre de la préparation du projet ont montré clairement que pour améliorer l’autonomisation des femmes, leurs moyens de subsistance et réduire les violences sexistes, celui-ci devait impérativement associer d’autres membres clés de la communauté : les plus âgés, les conjoints et les jeunes. 

Comprendre les dynamiques de genre, c’est comprendre la situation des femmes dans le cadre de leurs relations sociales.  

2. Il ne s’agit pas de faire plus, mais mieux On considère souvent que la prise en compte des problématiques liées au genre et aux inégalités entre les sexes entraîne un surcroît de travail lors des phases de préparation des projets. Lorsque les délais sont courts, comme dans le cas de projets d’urgence par exemple, et face à des priorités concurrentes, ces questions peuvent être reléguées au second plan. 

Pourtant, leur intégration au stade de la conception des projets n’implique pas de faire plus. Il s’agit de poser les bonnes questions. Que ce soit lors de discussions avec les pouvoirs publics sur la collecte de données post-catastrophe ou lors de la préparation de prototypes pour la conception d’abris multirisques. Dans le cas du projet en Haïti, poser les bonnes questions dès le départ a consisté à veiller à ce que la sécurité et les attentes des populations féminines soient prises en compte dans la conception des abris publics. Cette exigence a fait partie des mesures prises pour réduire les disparités hommes-femmes dans l’utilisation des refuges, une difficulté identifiée dans le cadre d’une étude comportementale plus large sur l’évacuation des populations. 

3. L’égalité hommes-femmes, ce n’est pas répondre à un cahier des charges. C’est l’une des clés d’une conception de projets réussie En comprenant les facteurs d’inégalité entre les sexes en cas de catastrophe naturelle, on peut plus globalement améliorer la conception des politiques publiques. 

Un pays qui a subi un sinistre meurtrier peut être tenté d’investir dans des technologies et des modèles plus onéreux et plus sophistiqués dans le but d’affiner ses prévisions. Les faits montrent cependant que la surmortalité féminine lors d’une catastrophe naturelle s’explique généralement par un manque d’informations, un accès inadéquat à des lieux de repli ou l’absence de pouvoir de décision, un phénomène observé au Bangladesh (a), en Indonésie (a) et au Népal (a). Dans certains pays, investir dans l’élargissement de systèmes d’alerte précoce, la sécurité et la gestion des refuges, tout en faisant progresser la participation et le leadership des femmes dans la gestion des catastrophes, pourrait s’avérer une stratégie plus efficace pour réduire le taux de mortalité dû à ces événements. 

La prise en compte des inégalités hommes-femmes dans la conception des projets présente des avantages, mais aussi des défis. L’un des plus importants réside dans l’absence d’outils et de cadre cohérent pour évaluer ces disparités dans le contexte de la gestion des risques de catastrophe. Pour y remédier, un nouveau rapport de la Facilité mondiale pour la prévention des catastrophes et le relèvement (GFDRR) (a), intitulé Gender Dimensions of Disaster Risk and Resilience (a), fournit un cadre opérationnel utile sur les dynamiques de genre qui influent sur l’impact des catastrophes naturelles.

En comprenant les facteurs qui prédéterminent les différentes répercussions d’une catastrophe chez les femmes et les filles, nous pourrons aider les pays à trouver des solutions pérennes pour que la question du genre devienne partie intégrante de la conception et de la mise en œuvre de mesures clés en faveur de sociétés résilientes, inclusives et stables. 

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