Publié sur Voix Arabes

Comment les pouvoirs publics peuvent-ils adopter une approche inclusive pour répondre à la crise climatique

Comment les pouvoirs publics peuvent-ils adopter une approche inclusive pour répondre à la crise climatique Crédit photo : shutterstock.com

Une approche « pansociétale » consiste à mobiliser l’ensemble de la société. Face aux défis du changement climatique, les gouvernements de la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA) mettent en place des actions axées sur la gestion de l'eau, les énergies renouvelables et les initiatives de développement durable. Toutefois, pour des solutions plus cohérentes, percutantes et centrées sur les citoyens face à cette problématique complexe et multiforme, la région MENA doit urgemment rendre la question climatique collective. L'inclusion de toute la société ne se limite pas aux actions gouvernementales ou aux entreprises du secteur privé, mais englobe aussi toutes les composantes de la société civile. Cela se traduit par une série de cercles concentriques d'acteurs, tant individuels que collectifs, chacun exerçant un pouvoir d'action dans sa vie et ses fonctions quotidiennes.

The World Bank

 

En effet, lors de la COP26 de 2021, le GIEC a souligné que pour atteindre les objectifs climatiques, il était impératif de développer une approche « pansociétale » mobilisant tous les acteurs et ressources, qu'ils soient gouvernementaux, privés ou issus de la société civile, dans la réponse mondiale au changement climatique. La Banque mondiale a abordé cette problématique en définissant et en organisant les actions nécessaires pour les individus, les communautés et la société civile. Le cadre de la Banque, qui englobe l'ensemble de la société, regroupe ces initiatives variées sous trois axes d'action. La première série d'actions vise à promouvoir la « collaboration », en encourageant les gouvernements de la région MENA à impliquer les acteurs nationaux et locaux de la société civile, tels que les universitaires, les associations d'agriculteurs et les groupes de réflexion, dans l'élaboration, la planification et le suivi des politiques climatiques. Ces processus pourraient inclure des assemblées citoyennes pour le climat et des conseils de jeunes soutenant la formulation des Contributions déterminées au niveau national (CDN), un modèle déjà bien établi dans d'autres régions.

La deuxième série d'actions met l'accent sur les « actions indépendantes », par lesquelles les gouvernements cherchent à autonomiser tous les individus, les communautés et les organisations locales, chacun étant motivé à agir de manière plus efficace et durable. Ces actions pourraient inclure la sensibilisation et le partage des connaissances, la mise en place de systèmes d'alerte précoce dirigés par les communautés et des adaptations locales aux inondations et aux sécheresses, l'incubation d'entreprises sociales vertes qui innovent pour répondre aux futurs défis liés à l'énergie, à l'eau et à l'agriculture, ou encore des sociétés entières modifiant leurs comportements et leurs modes de vie pour garantir leur accès à de l'eau potable et à une énergie durable.

La troisième série d'actions, axée sur la « responsabilité », concerne l’instauration d’un environnement responsable en matière de climat, où les capacités des universités, des groupes de réflexion, des médias et des ONG locales sont mises à contribution pour exiger des gouvernements, des entreprises privées et des institutions mondiales qu'ils rendent compte de leurs engagements, financements et investissements climatiques. Par exemple, de nombreuses organisations de la société civile (OSC) ont réalisé d’énormes progrès en créant des bases de données permettant de suivre et de rendre visibles les progrès climatiques au niveau national, tandis que d’autres œuvrent localement pour améliorer la collecte des données climatiques et l’accessibilité des informations.

En Iraq, par exemple, les efforts du ministère de l'Environnement en faveur de l'ensemble de la société ont mis l’accent sur le renforcement des connaissances et le changement de comportement, notamment chez les jeunes, les travailleurs agricoles et les fonctionnaires locaux. Ils ont également pris conscience de la nécessité d'une alliance pansociétale et s’efforcent de renforcer l’engagement du gouvernement en faveur de mesures locales d’adaptation et d’atténuation.

Au Népal, un ensemble d'initiatives a été lancé pour impliquer l'ensemble de la société dans l'action climatique du gouvernement. À l'échelle nationale, suite à l’identification du budget climatique du gouvernement, un budget climatique citoyen a été mis en place pour sensibiliser davantage le public aux dépenses publiques consacrées au climat. La Banque et d'autres bailleurs de fonds ont également soutenu l’élaboration d’un Cadre national de plans d'action locaux pour l’adaptation au changement climatique — un processus de planification de l'adaptation au changement climatique et de budgétisation locale, dirigé par les communautés et impliquant diverses parties prenantes, qui aide les gouvernements locaux à collaborer avec les communautés pour concevoir ensemble des actions climatiques.

Au Kenya, l'appui de la Banque mondiale au Projet de financement de l'action climatique pilotée localement facilite non seulement la planification de l'adaptation sur le terrain, mais contribue également à établir un modèle permettant de rediriger davantage de fonds vers les administrations et les communautés pour financer les investissements prioritaires, transformant ainsi les mesures d'adaptation adaptées en une réalité concrète. Le projet adopte par ailleurs une approche pansociétale, favorisant la collaboration entre les pouvoirs publics et la communauté, en mettant un accent particulier sur les groupes vulnérables et en déployant des solutions de proximité à l’échelle nationale.

Comprendre les différents aspects d'une approche pansociétale de l'action climatique est essentiel pour les gouvernements, car elle permet de regrouper sous un même cadre les diverses initiatives centrées sur les personnes et orientées vers la gouvernance, souvent dispersées en raison de priorités concurrentes telles que la responsabilité verte, l'adaptation au niveau local, la transition juste et les programmes de changement de comportement.

Il ne fait aucun doute que davantage de compréhension et d'actions menées par un plus grand nombre d'acteurs renforceront, accéléreront et consolideront la trajectoire des gouvernements vers le zéro net et la résilience climatique. Dans le cadre de leurs efforts pour cerner les enjeux exacts de ce changement, les gouvernements de la région MENA peuvent adopter ces trois axes d'action.

Des années se sont écoulées depuis l’émergence du concept de « pansociété ». Il est désormais temps de progresser de manière plus décisive, globale et structurée pour en réaliser pleinement le potentiel. La transformation rapide nécessaire pour atteindre les objectifs de 2030 est trop ambitieuse pour qu’il soit judicieux de laisser un large éventail d’acteurs en dehors du processus climatique, ce qui irait à l'encontre de tous nos efforts en faveur du climat.


Harika Masud

Senior Social Development Specialist

Janelle Plummer

Independent Consultant: Climate Action & Governance Specialist

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