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L’indice de capital humain a un an : premier bilan et perspectives

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Une école au Bangladesh. Photographie : Scott Wallace/Banque mondiale Une école au Bangladesh. Photographie : Scott Wallace/Banque mondiale

L’indice de capital humain (ICH) a un an déjà ! Rappelons que cet indice mesure la contribution de la santé et de l’éducation à la productivité de la prochaine génération d’un pays et qu’il repose sur des études microéconométriques. Sa création s’inscrit dans le cadre plus large du Projet pour le capital humain, une initiative du Groupe de la Banque mondiale visant à la fois à faire avancer les recherches et les évaluations et promouvoir l’engagement des pays dans ce domaine. Comme les anniversaires sont propices aux bilans, nous vous proposons de revenir sur les réalisations déjà obtenues dans le cadre de l’ICH et de réfléchir à l’avenir.

L’ICH a d’abord fourni aux pays, tous niveaux de revenu et contextes confondus, un nouvel outil pour investir plus efficacement dans leur population. La valeur de l’indice de capital humain varie sur une échelle de 0 à 1 et reflète le niveau de productivité d’un pays par rapport à son potentiel. Les scores obtenus affichent de fortes disparités — de 0,29 pour le Tchad à 0,88 pour Singapour, en passant par 0,59 pour le Pérou (0.59) — mettant en évidence l’ampleur des marges de progrès dans l’ensemble des pays. En outre, parce qu’un indice national peut cacher des inégalités considérables au sein d’un pays, l’ICH a aussi été calculé pour fournir des scores ventilés par région géographique dans une dizaine de pays et par niveau socio-économique dans environ 50 pays appartenant principalement à la catégorie des économies à revenu faible ou intermédiaire (a). Ces données plus fines doivent permettre de mieux orienter les discussions sur l’action à mener et d’améliorer le ciblage des politiques.

De nombreux pays sont passés à l’action.

  • Au Sahel, par exemple, le projet pour l’autonomisation féminine et le dividende démographique (SWEDD) a recours à des interventions multisectorielles destinées à apporter des services de planification familiale et à lutter contre les violences envers les femmes. Grâce aux investissements consentis dans le cadre de ce projet, les filles bénéficient d’une palette d’interventions en appui à leur scolarisation — transport, hébergement, fournitures scolaires et allocations monétaires — dans le but de leur permettre de développer pleinement leur potentiel.
  • Le gouvernement indonésien a lancé une stratégie nationale de réduction des retards de croissance, qui repose sur une approche multisectorielle, expérimente de nouveaux modes d’action à l'échelon des ménages et produit des résultats (a).
  • L’Éthiopie s’emploie à étendre le déploiement intégré d'activités d’approvisionnement en eau, d’assainissement et d'hygiène (a). Cette initiative, qui concerne cinq ministères, ne s’attaque pas seulement aux problèmes de santé causés par le manque d’accès à de l’eau salubre et à des installations sanitaires adéquates, mais il favorise aussi la scolarisation des filles en remédiant à l’absence de toilettes non mixtes et accessibles aux élèves en situation de handicap.
  • En Géorgie (a), le gouvernement introduit un nouveau programme destiné à accroître l'accès à l’éducation préscolaire, renforcer la qualité des enseignements et améliorer l’environnement d’apprentissage des élèves.
  • Les Îles Marshall ont récemment lancé une nouvelle initiative multisectorielle afin de favoriser la préparation à l’école primaire en renforçant le soutien apporté aux parents et en élargissant l'accès aux services préscolaires.

Et ce n’est là qu’un aperçu des projets ambitieux et complexes entrepris par les pays à travers le monde afin de développer et valoriser leur capital humain.

Plusieurs pays priorisent désormais le capital humain dans leurs plans nationaux de développement.

  • En Indonésie, le capital humain est devenu un aspect prioritaire du projet du président de la République pour son second mandat, un pilier fondamental du nouveau plan de développement à moyen terme pour la période 2020-2024 et un thème transversal du cadre budgétaire 2020.
  • Au Pérou, où le capital humain fait partie des objectifs du plan national pour la compétitivité, le gouvernement priorise les investissements dans une offre d'éducation de qualité et le développement de la petite enfance.
  • Au Kenya, une mission présidentielle s’est vu confier la tâche d’intégrer le capital humain dans le plan d’action national des « Big Four » axé sur quatre secteurs prioritaires : la sécurité alimentaire, le logement abordable, la santé et l’industrie manufacturière.

De plus en plus de pays ont recours à des stratégies qui couvrent l’ensemble des secteurs et des échelons de gouvernement. Une dizaine de pays ont organisé des séminaires nationaux afin de se pencher sur leurs résultats en matière de développement du capital humain.

  • L’Angola a réuni plusieurs de ses ministres en vue d’identifier les priorités d’action et de remédier aux goulets d'étranglement faisant obstacle à l’exécution.
  • L’Ukraine a créé un conseil de haut niveau sur le capital humain dans le but de coordonner les efforts.
  • Le Nigéria a fait approuver son nouveau plan pour le capital humain à la fois par les ministères clés et les gouverneurs des États, favorisant ainsi une adhésion qui s'étend du niveau fédéral à l'échelon local.

Le nombre de pays adhérant au Projet pour le capital humain a plus que doublé. Avant de lancer son nouvel indice, la Banque s'était rapprochée de 28 pays « pionniers ». Un an après, le Projet pour le capital humain s’est étendu à plus de 70 pays, en continuant de susciter un intérêt croissant dans l’ensemble des régions du monde et des économies, quel que soit leur niveau de revenu. En s’y associant, les pays affichent, tant en interne que sur le plan extérieur, leur conviction que le capital humain est un moteur de développement économique et leur détermination à en faire une priorité. Ils inscrivent ainsi leur engagement dans une volonté commune et éclairée de développement, de préservation et de valorisation du capital humain. Chaque pays a désigné un référent pour le projet, en général issu du ministère des finances, de l'économie ou de la planification, avec pour mission de coordonner une approche qui fédère l’ensemble de l’administration autour des défis du capital humain. 

Les pays échangent et apprennent les uns des autres. À l’occasion de ses Réunions de printemps 2019, le Groupe de la Banque mondiale a rassemblé les référents de 41 pays pour un forum de deux jours auquel ont également participé les représentations de 25 organisations partenaires et qui a permis d’aborder un large éventail de sujets à partir d’études de cas nationales. Plus généralement, le Projet pour le capital humain publie des newsletters afin de relier les référents, partager des travaux de recherche utiles et mettre en lumière les expériences recueillies dans les pays. Puis, lors des Assemblées annuelles 2019, la Banque a réuni 40 ministres des finances et autres champions mondiaux pour aborder la place du capital humain dans l’action menée en matière d’emploi et de transformation économique. Les référents de près de 20 pays se sont par ailleurs retrouvés de manière informelle pour échanger sur leurs expériences respectives.

En complément à l’ICH, et dans le but de galvaniser l’action nécessaire pour réaliser les objectifs mondiaux sur l’éducation, la Banque a récemment fixé une nouvelle cible à atteindre à l’horizon 2030 : réduire au moins de moitié la pauvreté des apprentissages dans le monde. La pauvreté des apprentissages correspond au pourcentage d’enfants ne sachant ni lire ni comprendre un texte simple à dix ans. Selon les estimations de la Banque et de l’Institut de statistique de l’UNESCO, elle touche plus de 50 % des enfants dans les pays à revenu faible et intermédiaire. Si toutes les compétences fondamentales comptent, l’acquisition de la lecture en particulier est le sésame qui donne accès aux niveaux d’enseignement supérieurs et le socle pour la constitution du capital humain. Afin de soutenir les efforts des pays dans ce sens, la Banque a élaboré un train de mesures reposant sur des interventions qui ont fait la preuve de leur efficacité pour améliorer l'alphabétisation dans des contextes nationaux divers.

Le Projet pour le capital humain approfondit les travaux de recherche et multiplie les possibilités d'échange afin de faciliter encore davantage les apprentissages mutuels. Un certain nombre de pays à travers le monde affichent des progrès réguliers dans la réduction des retards de croissance, l’amélioration des acquis scolaires et le renforcement de l'équité en matière de développement humain. Fort de ce constat, le Projet pour le capital humain s’emploie actuellement à analyser les ressorts de ces succès accélérés, pour permettre à d’autres gouvernements de s’en inspirer. Ces travaux, ainsi que d’autres réussites nationales, serviront de fil directeur au prochain forum des référents, prévu mi-2020 et coorganisé par le gouvernement de Singapour, pays qui arrive en tête de l’ICH.

L’indice de capital humain sera actualisé au premier semestre 2020. Grâce à la disponibilité de nouvelles données, concernant en particulier les petits États insulaires, cette mise à jour comprendra neuf pays supplémentaires, ce qui portera à 165 le nombre de pays couverts par l’indice. Elle intégrera des valeurs ventilées par sexe quand les données-pays disponibles le permettent, et sa parution est prévue dans le sillage de la publication, en décembre 2019, des résultats de la dernière enquête PISA de l’OCDE portant sur environ 80 pays (a). Cette version actualisée ne devrait pas apporter des modifications importantes dans les notes de chaque pays, mais elle permettra d'améliorer considérablement la validité et la cohérence des données qui entrent dans le calcul de l’indice. 

Le Projet pour le capital humain fédère les forces du Groupe de la Banque mondiale et de ses partenaires de développement. Dans un contexte marqué par les changements récents à sa direction, la Banque reste résolument engagée en faveur de ce projet. Le Comité du développement, forum du Groupe de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international établi au niveau ministériel pour faciliter la recherche de consensus intergouvernementaux, a salué les efforts déployés jusque-là dans le cadre du Projet pour le capital humain et appelé à la poursuite des réformes institutionnelles et de politique générale nécessaires. Le plan du Groupe de la Banque mondiale pour le capital humain en Afrique, qui se donne pour objectif d’augmenter de 13 % la productivité de la prochaine génération de travailleurs dès 2023, connaît des développements rapides sur le plan opérationnel. Plus récemment, la Région Moyen-Orient et Afrique du Nord a également donné le coup d’un envoi d’un plan régional de développement du capital humain, tandis qu’une initiative similaire est en cours d’élaboration pour l’Asie du Sud. Les « Champions du capital humain » (a), coalition informelle de dirigeants du monde entier, contribuent à amplifier le soutien en faveur du projet. Sur le terrain, celui-ci continue de bénéficier de la collaboration apportée par divers partenaires, dont entre autres la Fondation Bill & Melinda Gates, la Fondation Dangote, l’UNICEF, le PNUD, la JICA, l’OMS et SUN.

Le capital humain sous-tend les trois thèmes structurants du train de mesures proposé pour IDA-19, à savoir la croissance, la population et la résilience. La 19e reconstitution des ressources de l’IDA, le fonds du Groupe de la Banque mondiale qui alloue des financements concessionnels aux pays les plus pauvres du monde, constitue une chance capitale de soutenir des investissements dans le capital humain essentiels là où les besoins sont les plus importants. 

L’ICH, un an après ! Nous vous invitons à consulter le premier rapport d’étape sur le Projet pour le capital humain. Si vous souhaitez nous faire part de votre expérience ou de vos suggestions, contactez-nous en écrivant à : humancapitalproject@worldbank.org. Votre avis nous intéresse.

Pour en savoir plus sur le Projet pour le capital humain, rendez-vous sur notre site web.


Auteurs

Kavita Watsa

Senior Operations Officer

Jason Weaver

Senior Economist, Education Global Practice

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